Le plus vieux libraire d`Alep continue d`exercer face à la guerre

  28 Décembre 2015    Lu: 850
Le plus vieux libraire d`Alep continue d`exercer face à la guerre
Cheikh Abdelkhaleq Chamia, 82 ans, vend des livres à Alep depuis plus de 55 ans, et continue de le faire en défiant les balles et les bombardements «au service du savoir et de la culture».
Barbe blanche et silhouette courbée par le poids des années et les souffrances infligées par la guerre, Cheikh Chamia continue de vendre des livres à Alep, profession qu’il exerce avec passion depuis plus de 55 ans.

Cheikh Abdelkhaleq Chamia est né en 1933 dans une illustre famille aleppine. Son allure digne et ses traits fins témoignent de ses origines nobles, en dépit du simple accoutrement et de la petite condition imposées par la situation de sa ville, classée récemment comme "la plus dangereuse au monde".

Il a étudié, dès son jeune âge, à la grande mosquée omeyyade d’Alep, puis a commencé en 1950 à collectionner les livres historiques, archéologiques, religieux et culturels, avant d’ouvrir des librairies pour vendre ses livres, déclinés dans diverses langues, aux touristes et aux étrangers.

Ses librairies se trouvaient dans le très ancien Souk Ezzahraoui, sur l’avenue Khan al-Wasir et à Khan al-harir, dans le vieux Alep. Dépuillé par la guerre, il se retrouve aujourd’hui à vendre ses livres dans une vieille librairie pratiquement en ruines, et à moitié dans la rue, au pied d’un mur qui tient à peine, à l’image de la ville et du pays ravagés par un conflit sanglant depuis cinq ans.

Cheikh Chamia est le plus ancien libraire d’Alep encore en vie. Il a confié au correspondant d’Anadolu, qui l’a rencontré chez lui à Alep, avoir appris le métier à la majorité des grands libraires de la ville, qu’il fournissait en livres à leurs débuts.

Il dit fièrement qu’il continuera malgré tout de vendre ses livres «au service du savoir et de la culture», et affirme aimer ce travail qui lui a beaucoup apporté.
«J’ai beaucoup appris des livres, qui m’ont également permis de gagner ma vie et d’élever mes onze enfants», a-t-il renchéri.

L’octogénaire regrette, d’un air triste et abattu, que tous ses enfants aient dû fuir la guerre en Syrie, appelant les Syriens à l’unité "et à ne pas permettre à des parties étrangères de les manipuler et de les exploiter".

«Les Etats-Unis ont créé le terrorisme en Syrie, et en sont les plus grands bénéficiaires», a-t-il accusé.

Après le décès de sa femme, cheikh Chamia vit toujours dans sa maison du vieux Alep, contrôlé majoritairement pas l’opposition. Sa maison, située en face du vieux fort investi par les forces du régime, a été détruite dans les bombardements de l’armée de Bachar al-Assad et se trouve aujourd’hui sur la ligne de mire d’un sniper du régime, positionné dans le fort.

Même si les clients se font de plus en plus rares, Cheikh Chamia tient à braver les dangers et à ouvrir tous les jours sa librairie, et s’obstine à «servir le savoir et la connaissance»

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