Tabagisme : réduire sa consommation est insuffisant, seul l'arrêt est efficace

  31 Mai 2018    Lu: 1099
Tabagisme : réduire sa consommation est insuffisant, seul l

Rien ne sert de réduire le tabac : la seule façon de protéger ses poumons, c'est l'arrêt complet ! C'est le résultat d'une nouvelle étude, qui conclut qu'en matière de risque pour la fonction pulmonaire, la durée du tabagisme compte plus que son intensité.

A moins d'arrêter complètement, la quantité de cigarettes fumées n'a que peu d'impact sur le risque pour la santé pulmonaire, conclut une nouvelle étude. Autrement dit, diminuer le nombre de cigarettes fumées par jour n'a que peu d'effets sur la santé : seul l'arrêt complet apporte des effets positifs. Encore non publiée, cette étude a été présentée à la Conférence Internationale de l'American Thoracic Society, qui s'est tenue du 18 au 23 mai 2018 à San Diego.

Le tabagisme est depuis longtemps associé à une accélération du déclin de la fonction pulmonaire et au risque de maladie des poumons. Ainsi, la fumée toxique des cigarettes peut conduire à des emphysèmes (inflammation puis déformation et rupture des alvéoles pulmonaires), une des composantes de la bronchopneumopathie chronique obstructive (BPCO). La BPCO est caractérisée par un rétrécissement progressif et une obstruction permanente des voies aériennes et des poumons, entrainant une gêne respiratoire. Elle cause 16.000 décès par an dans le monde, et 80% des cas sont dus au tabagisme.

3.140 patients suivis pendant 30 ans

Si le lien entre ces pathologies et le tabagisme sont bien établis, la documentation actuelle ne permet cependant pas de corréler précisément le risque en fonction du seuil d'exposition au tabac, expliquent les auteurs de la publication. Une des raisons est que les "petits fumeurs", c'est-à-dire fumant moins de 10 paquets par an, sont souvent exclus des études dédiées au tabagisme. Pour clarifier ce point, ils ont donc eu recours à des données recueillies sur 30 ans auprès de 3.140 participants à une étude sur le développement du risque coronarien chez les jeunes adultes (CARDIA). Âgés de 25 ans en moyenne au début de l'étude, les participants étaient fumeurs pour près de la moitié. Au cours des trente ans de suivi, la fonction pulmonaire des patients a été suivie régulièrement par une spirométrie (un test de respiration dans lequel le patient doit souffler le plus fort possible dans un dispositif qui mesure le volume d'air expiré), et un scanner thoracique. Les résultats ont été ajustés pour un certain nombre de facteurs qui pourraient biaiser les résultats (y compris l'âge, l'origine ethnique, le sexe, l'indice de masse corporelle et l'asthme), mais pas au tabagisme passif, à la fumée de marijuana ou à l'utilisation d'une cigarette électronique.

Un risque d'emphysème multiplié par 3,4 pour les gros fumeurs qui ont arrêté, contre 8,5 pour les petits fumeurs réguliers

Sans surprise, les gros fumeurs réguliers sont ceux qui ont été les plus affectés 30 ans plus tard, avec une quantité d'air expirée de force en une seconde qui diminuait de 42,2 millilitres d'air chaque année. Par rapport aux non fumeurs, les gros fumeurs avaient un risque de développer un emphysème multiplié par 26, et une BPCO par 8.

Plus étonnant : entre les petits fumeurs réguliers (moins de 10 paquets par an depuis 30 ans) et les gros fumeurs qui ont arrêté, la différence était très nettement en faveur des anciens gros fumeurs, alors qu'ils avaient été à l'époque plus exposés à la fumée que les petits fumeurs réguliers avec 9,8 paquets par an contre 6,4. Les anciens gros fumeurs avaient ainsi conservé une meilleure fonction pulmonaire avec une perte de seulement 33,8 millilitres par an contre 35,7 pour les petits fumeurs réguliers lors d'une expiration forcée d'une seconde. Le risque d'emphysème était également en faveur des anciens fumeurs, chez qui il n'était multiplié que par 3,4 par rapport aux non-fumeurs, contre 8,5 pour les petits fumeurs réguliers. "Nous avons été surpris de constater que ceux qui ont arrêté de fumer étaient moins à risque que le groupe que nous avons identifié comme étant des fumeurs stables et à faible taux, même si ceux qui ont cessé de fumer avaient une plus longue exposition aux cigarettes", ont commenté les auteurs dans un communiqué.

PAS DE SEUIL. Ces résultats soulignent clairement qu'il n'existe pas de seuil de tabagisme en dessous duquel le risque pour la santé pulmonaire est maîtrisé. "La durée du tabagisme était un meilleur prédicteur du risque d'emphysème que l'intensité du tabagisme, démontrant les effets néfastes sur la santé du tabagisme à long terme, peu importe la quantité de cigarettes fumées", concluent les auteurs dans la publication.

Source: Sciences et Avenir


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