Scotland Yard sur la piste d'un tueur en série de chats

  16 Décembre 2017    Lu: 1619
Scotland Yard sur la piste d'un tueur en série de chats
En deux ans, près de 400 animaux ont été décapités au Royaume-Uni. La mise en scène des cadavres, et la nature des sévices, font penser à un tueur en série. Outre-Manche, une petite association mène l'enquête, aidée par Scotland Yard.
C'est devenu un sombre rituel pour Tony Jenkins. Se rendre chez un vétérinaire, examiner un cadavre de chat. Et constater, trop souvent, qu'il s'agit d'une nouvelle victime d'un possible tueur en série d'animaux sévissant dans le sud londonien.

Personne ne semble vraiment surpris quand ce cinquantenaire, cofondateur d'une petite association de protection des animaux, Snarl, se présente en cette froide après-midi d'automne à l'accueil d'un cabinet vétérinaire. Tony, visage buriné et cheveux blancs, est conduit dans une salle d'auscultation où l'attend, posé sur une table d'examen, un sac en plastique. Avec une gestuelle trahissant l'habitude, il enfile une paire de gants et en sort le cadavre d'un chat noir à pattes blanches.

L'assistante vétérinaire à ses côtés a un mouvement de recul: la tête et la queue de l'animal ont été sectionnées avec une précision chirurgicale. Même Tony accuse le coup. «Salopard», lâche-t-il entre ses dents.

«C'est clairement une victime (du tueur)», dit-il à l'AFP, évoquant des chats «présentant exactement les mêmes caractéristiques» retrouvés «dans toutes sortes d'endroits», à Londres, Brighton (sud) ou Northampton (centre).

En l'espace de deux ans, ce sont 400 victimes qui ont été recensées par Snarl, en majorité des chats, mais aussi des renards ou des lapins.

Des cadavres mis en scène

Pour Tony, tout commence en septembre 2015. Intrigués par une succession de décès suspects, lui et Boudicca Rising, cofondatrice de l'association Snarl, contactent vétérinaires et propriétaires d'animaux, ébauchent une cartographie des crimes, recoupent les faits. «A ce moment-là, on a compris que quelque chose était en train de se passer», raconte Boudicca. L'affaire remonte aux oreilles de Scotland Yard, qui ouvre une enquête, de même que la Société royale de protection des animaux (RSPCA).

«Le tueur en série de chats frappe encore», titre la BBCen janvier 2016, tandis que la thèse d'un psychopathe plonge dans l'effroi les propriétaires d'animaux. SurFacebook, la page de Snarl devient une funèbre liste des victimes du «Croydon Cat Ripper», tel qu'il est parfois surnommé, en référence à la ville du sud de Londres où il officie principalement. «Repose en paix», écrit une internaute, Kate Norton, à côté d'une photo de «Pepper», un chat tigré. «Quant à l'ordure maléfique et malade qui a fait ça, puisses-tu pourrir en enfer!».

La vie de Tony et Boudicca bascule, à mesure qu'ils se transforment en duo d'enquêteurs. Ils découvrent avec stupeur que les cadavres décapités sont parfois mis en scène, disposés près d'une école ou d'un parc, voire sous les fenêtres de leurs propriétaires.

S'il est dans un premier temps envisagé que les chats aient pu être victimes d'autres animaux, le doute ne semble plus permis. «La police croit qu'une personne ou un groupe de personnes (...) sont responsables des morts et mutilations», dit à l'AFP Scotland Yard, tout en refusant, à ce stade, de commenter la thèse du «tueur en série».

Signe de l'intérêt pour cette affaire qui mobilise des moyens d'une rare envergure pour des crimes d'animaux, l'Agence Nationale de lutte contre le crime (NCA) est mise sur le coup, tandis que deux organisations, dont PETA, offrent une récompense à quiconque aidera à la capture du tueur.

Les humains, étape suivante?

Tony tente aussi, avec ses moyens, de le débusquer. «Mais c'est difficile», confie-t-il. «J'aimerais parfois que ce soit un peu plus comme dans Les Experts», série où les crimes sont résolus via des méthodes scientifiques. Exploitant chaque indice, soucieux de n'écarter aucune éventualité, il finit par tomber sur un revendeur de crânes d'animaux. Las, c'est une fausse piste: «C'est bizarre de faire ça mais ce n'est pas vraiment illégal, et il les importait de Chine.»

L'enquête a néanmoins permis de dresser un portrait-robot du tueur. Selon Snarl, il s'agirait d'un homme blanc d'une quarantaine d'années, d'environ 1 mètre 80, qui «a vraisemblablement grandi à Croydon». Un mystérieux criminel qui interpelle par ses talents de «dissecteur» et sa capacité à déjouer toute surveillance, souligne Vincent Egan, professeur en criminalistique à l'université de Nottingham. Il «doit être capable d'attirer l'animal, de le tuer sans être griffé, de le disséquer, de placer le corps dans un endroit où il peut être vu, et tout cela discrètement».

Et alors que la liste de ses victimes ne cesse de s'allonger, une question se fait de plus en plus pressante: les chats ne sont-ils qu'une étape? «On sait qu'il existe un lien entre les tueurs en série et des cas de violence contre des animaux», soulignait récemment Andy Collin, responsable de l'enquête policière, sur Sky News. «L'hypothèse, c'est que ce tueur obtient une certaine forme de satisfaction (en tuant des chats). La crainte, c'est qu'il finisse par ne plus l'obtenir. Et qu'il s'en prenne alors aux humains, et notamment aux femmes».

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