Paillettes, rose et princesses pour les filles ; bleu et super-héros pour les garçons. Idem pour les jouets. A l’heure ou le « genrisme » est dénoncé, c’est-à-dire la distinction sociale due au genre de son sexe, il existe toujours un rayon homme et un rayon femme dans nos magasins. C’est ce qu’a voulu dénoncer Alice du haut de ses 5 ans. Se plaignant de ne trouver que des tenues saumon, fuchsia ou encore magenta chez Gap, la petite américaine a décidé d’envoyer une lettre, avec l’aide de sa maman, à la marque. Le PDG Jeff Kirwan a réagi en promettant des habits neutres.
Bleu : divinité, pureté ou virilité ?
Le bleu a toujours été une couleur privilégiée par les Européens et les Occidentaux. Ses nombreux symboles ont changé au fil des siècles, faisant écho à la divinité sous l’Antiquité, à la Vierge au Moyen-Age et à la virilité depuis les années 1950.
Sous la Grèce Antique, les familles priaient les dieux pour avoir un garçon et non une fille, considérée comme étant comme un fardeau. En effet, les hommes aidaient leur famille dans les champs, mais était aussi une source de revenu. A l’inverse, les filles étaient une source de dépenses. Il fallait leur payer une dote pour la marier. Et elles n’avaient pas la même force pour le travail des champs. Enfanter un garçon était donc un cadeau des dieux. Or le bleu étant la couleur divine, le bleu était de fait la couleur du garçon.
Mais au XIIe, le bleu devient la couleur de la Vierge Marie. Il est alors associé à la pureté. Les femmes, pures, doivent donc se vêtir de bleu.
Le siècle des Lumières se réapproprie les valeurs antiques et marque ainsi le retour du bleu comme couleur de la masculinité. Néanmoins, la mode enfantine n’était pas véritablement « genrée » avant les années 1950. Pendant longtemps, les enfants portaient du blanc, couleur d’innocence et de propreté, jusqu’à leur 6 ans. Habiller ses enfants en blanc était aussi pratique, car on pouvait blanchir la couche ou le vêtement sale.
Rose, du chevalier à la féminité
La couleur rose n’a pas toujours été associée aux fillettes. Au Moyen Age, elle était même réservée aux hommes, comme le montre les bas des chevaliers. Les femmes s’habillaient en bleu et les hommes de rose, considéré comme étant un rouge clair, or le rouge était associé à l’agressivité et à la virilité, donc aux hommes.
Mais ce n’est que dans les années 1950 et avec la figure de l’actrice américaine et souveraine de Monaco, Grace Kelly que le rose prend la dimension que l’on connait aujourd’hui. L’actrice adorait la couleur rose. Elle décida d’habiller sa nouveau née, Caroline de Monaco uniquement en rose. Sur beaucoup de photos prises par les paparazzis ou des photographes officiels, Caroline est alors vêtue de rose de la tête aux pieds.
Les années 1970 marquent le début des premières échographies. Il est maintenant possible de connaitre le sexe de son enfant et ainsi de préparer son arrivée en fonction de son sexe. Dès les années 1980, les grandes marques de mode, notamment, s’emparent du code couleur : rose pour les fillettes et bleu pour les gaillards. Selon Jo B. Paoletti, professeur à l’Université Maryland de Washington, « plus on individualise le vêtement, plus on le vend. » Ainsi elle démontre dans son livre Pink and Blue : Telling the Boys from the Girls in America paru en 2012, comment la société de consommation a fait naitre la mode enfantine « genrée ».
De nombreux parents ont salué la décision de la marque de prêt-à-porter Gap. Serait-ce la fin du « marketing genré » ?
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