La Birmanie organise ses premières élections libres et phares depuis 25 ans

  13 Novembre 2015    Lu: 527
La Birmanie organise ses premières élections libres et phares depuis 25 ans
Le parti d`Aung San Suu Kyi est pressenti comme le futur vainqueur du scrutin.
Le 8 novembre doit marquer l`histoire de la Birmanie. Après 50 ans de dictature, les 32 millions d`électeurs birmans se sont rendus aux urnes avec pour objectif d`arrimer leur pays à la transition démocratique.

Le dernier scrutin national libre au niveau national remontait à 1990. À l`époque, le parti d`Aung San Suu Kyi, la Ligue nationale pour la démocratie (LND), s`était imposé triomphalement. Une victoire au goût amer. Les militaires avaient annulé le scrutin et placé la Dame de Rangoun en résidence surveillée. Pour jouer le jeu de la transparence, le pouvoir a sollicité ce dimanche la présence d`observateurs internationaux européens et américains.

On sait toutefois par avance que ce scrutin ne sera pas parfait. À la mi-octobre, le gouvernement a signé un cessez-le-feu avec huit organisations séparatistes émanant des minorités ethniques situées près des frontières. Un accord imparfait, puisqu`une douzaine d`autres formations armées se sont abstenues d`y participer ou ont été volontairement tenues éloignées par le pouvoir. Ce dernier n`a pas placée de bureaux de vote dans les zones de guérilla concernées, notamment au sein de l`État Shan ou l`État Kachin. «L`argument des combats fournit au régime une justification bien pratique pour ne pas organiser le scrutin dans des zones où le vote lui serait défavorable, car acquis aux formations ethniques ou à la LND», explique Olivier Guillard, chercheur à l`Iris et spécialiste de la Birmanie

Les grandes questions éludées

Par ailleurs, l`ONU s`est dite préoccupée de la situation des Rohingyas, une ethnie musulmane dans un pays à l`écrasante majorité bouddhiste. Situés à la frontière du Bangladesh, ses membres sont considérés comme des citoyens de seconde zone, et n`ont pas le droit de vote. Certains candidats nationalistes les conspuent, tentant de faire fructifier leurs voix sur le rejet qu`inspirent les Rohingyas aux autres ethnies. La communauté internationale s`est interrogée sur le silence d`Aung San Suu Kyi à ce sujet. «Aung San Suu Kyi n`est plus simplement une opposante au régime, explique Olivier Guillard. Elle est maintenant dans une logique électorale. La question des Rohingyas et des populations opprimées n`intéresse pas grand monde en Birmanie. Elle pourrait même coûter des voix à la LND si celle-ci abordait la question, car il serait impopulaire de s`exprimer en leur faveur.»

Le choix des électeurs se forgera plutôt sur leur proximité avec les ex-militaires au pouvoir ou au contraire avec les partisans d`une plus grande démocratie. Les questions fondamentales pour l`avenir de la Birmanie sont remises au lendemain de l`élection. «L`un des enjeux sera de savoir comment vont être gérées les ressources présentes sur le sol des minorités, explique Sophie Boisseau du Rocher, chercheuse associée à l`Ifri, spécialiste de l`Asie. Pour le moment tous les revenus reviennent aux militaires et rien ne profite aux populations locales. L`autre grande question sera l`organisation future du pays. Le parti au pouvoir, l`ULDP, plaide pour un Etat uni et soumis aux Bamars, l`ethnie majoritaire du pays. La LND, plaide pour un système plus souple reconnaissant des droits aux minorités.»

Tags:  


Fil d'info