Bruxelles va publier à la mi-journée des rapports sur la situation économique et budgétaire de chacun des 27 pays de l'Union européenne. La Commission constatera que près d'une dizaine d'entre eux, dont la France et l'Italie, ont dépassé l'an dernier la limite de 3% du PIB pour les déficits publics fixée par le Pacte de stabilité.
Formellement, l'exécutif européen proposera aux Etats membres d'ouvrir les procédures disciplinaires prévues par les règles budgétaires européennes lors d'une prochaine réunion des ministres des Finances, probablement le 16 juillet.
Ces règles ont été mises en sommeil après 2020 à cause de la crise économique liée au Covid puis à la guerre en Ukraine. Elles ont été réformées et réactivées cette année.
Le Pacte de stabilité prévoit en principe des sanctions financières à hauteur de 0,1% du PIB par an pour les pays qui ne mettront pas en oeuvre les corrections imposées, soit près de 2,5 milliards d'euros dans le cas de la France.
- Sanctions jamais appliquées -
En réalité, ces punitions, politiquement explosives, n'ont jamais été appliquées.
La France, dont le dernier excédent budgétaire remonte à 1974, a été la plupart du temps en procédure de déficit excessif depuis la création de l'euro au tournant des années 2000. Elle en était toutefois sortie depuis 2017.
Le pays, dans le viseur des agences de notation, est en crise politique depuis la dissolution de l'Assemblée nationale décidée par Emmanuel Macron après la défaite de son camp aux élections européennes le 9 juin.
Les taux d'emprunt de la deuxième économie européenne ont subitement augmenté et la Bourse de Paris a chuté sous l'effet de l'instabilité.
Les oppositions d'extrême droite et de gauche, en tête dans les sondages, prévoient en outre d'ouvrir grand le robinet des dépenses mais aussi de revenir sur les réformes emblématiques des retraites et du marché du travail préconisées par Bruxelles.
De quoi compromettre la promesse de Paris, déjà jugée peu crédible, de revenir sous le seuil des 3% pour le déficit en 2027.
Des bras de fer politiques se profilent déjà entre Rome et Paris, d'un côté, et la Commission et les pays les plus sourcilleux en matière de respect des règles budgétaires, dont l'Allemagne, de l'autre.
- Tensions géopolitiques -
Corriger les dérapages sera dans tous les cas difficile dans un contexte de faible croissance et de tensions géopolitiques. Les finances publiques sont fortement mises à contribution pour soutenir l'Ukraine face à la Russie, mais aussi pour investir dans la transition verte face au réchauffement climatique.
Les règles européennes imposent aux pays en déficit excessif une réduction minimum du déficit de 0,5 point par an, ce qui suppose un effort de rigueur massif.
D'ici début octobre, les Vingt-Sept devront envoyer à Bruxelles leurs plans budgétaires pluriannuels qui seront scrutés par la Commission et le Conseil, l'instance des Etats membres. Bruxelles donnera en novembre ses recommandations pour le rétablissement des comptes publics.
Les déficits les plus élevés de l'UE ont été enregistrés l'an dernier en Italie (7,4% du PIB), en Hongrie (6,7%), en Roumanie (6,6%), en France (5,5%) et en Pologne (5,1%). Outre ces cinq pays, les procédures pour déficits excessifs devraient concerner aussi la Slovaquie, Malte (4,9%) et la Belgique (4,4%).
Trois autres pays pourraient être épinglés mais avec moins de certitude. L'Espagne et la République tchèque ont dépassé les 3% en 2023 mais prévoient de revenir dans les clous dès cette année. L'Estonie a également franchi ce seuil mais sa dette publique, à environ 20% du PIB, reste très en-deçà de la limite de 60% fixée par l'UE, contrairement aux autres pays cités.
Le Pacte de stabilité a été adopté en 1997 en vue de l'arrivée de la monnaie unique au 1er janvier 1999. Répondant au souci de l'Allemagne d'éviter que des pays membres mènent des politiques budgétaires laxistes, il fixe l'objectif de comptes à l'équilibre.
afp