La moitié des sites naturels classés par l’Unesco menacée

  06 Avril 2016    Lu: 822
La moitié des sites naturels classés par l’Unesco menacée
Forêts humides de Madagascar, parc national en Espagne et en Mauritanie, réserve animalière en Tanzanie, récif de Belize: ces lieux exceptionnels font partie des 114 sites classés par l’Unesco qui sont menacés par des activités économiques, selon le WWF.
«Sur les 229 sites naturels inscrits au Patrimoine mondial, 114 sont concernés par des activités industrielles néfastes», écrit l’ONG dans un rapport publié mercredi («Protéger les hommes en préservant la nature»). «Ces sites incarnent la notion d’aire protégée par excellence», rappelle pourtant le WWF, qui s’est appuyé sur un recensement établi par l’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN). Mais le classement par l’Unesco n’est pas forcément synonyme d’une protection exemplaire, montre le rapport.

«Entres autres activités néfastes, qui sont souvent le fait de multinationales et de leurs filiales, on peut citer l’exploration et l’extraction pétrolière et gazière, l’exploitation minière, l’exploitation forestière illégale, la création de grandes infrastructures, la surpêche et la surexploitation des ressources en eau», résume l’ONG. Aucun continent n’est épargné par le classement du WWF qui appelle gouvernements et entreprises à agir en faveur d’un futur durable pour tous ces lieux exceptionnels.

L’Unesco, qui a labellisé les sites après une demande émanant des États, n’a pas le pouvoir de contraindre les gouvernements à les protéger. En dernier recours, l’organisme onusien peut retirer le site de sa liste. Cela est arrivé une seule fois, à Oman, pour le sanctuaire de l’oryx arabe, un type d’antilope, qui a été au fil des ans envahi par les forages pétroliers et où le braconnage s’est développé.

Le rapport souligne qu’en plus de porter atteinte à un patrimoine ayant «une valeur universelle exceptionnelle», la dégradation de ces lieux pourrait «remettre en cause leur capacité (…) à apporter des bénéfices économiques, sociaux et environnementaux» aux quelque 11 millions de personnes qui en dépendent. Environ un million de personnes vivent au sein même de 119 sites classés et menacés et 10 millions habitent à proximité.

Les forêts tropicales humides de l’île de Sumatra (Indonésie) sont un exemple inquiétant. Le site comprend trois parcs nationaux abritant de vastes bassins hydrographiques qui fournissent de l’eau à des millions de personnes. Mais ces forêts sont menacées par l’exploitation forestière et des concessions (mines, pétrole, gaz), à ce stade non exploitées.

En Espagne, le parc national de la Donana, qui accueille chaque année des millions d’oiseaux migrateurs, a été victime en 1998 d’une vaste pollution par des déchets miniers (boues toxiques et eaux acides). En 2015, le gouvernement espagnol a de nouveau octroyé des droits d’extraction à une compagnie mexicaine (Grupo Mexico).

En Tanzanie, la réserve animalière de Selous fait face à plusieurs dangers: des activités minières et pétrolières de plus en plus nombreuses, la construction de routes et un projet de centrale hydroélectrique qui nécessiterait l’inondation de certaines zones. Parmi les sites marins, le récif de Belize, qui comprend sept zones protégées et intégrées à la plus longue barrière de corail du continent américain, est considéré en péril depuis 2009. La construction de stations balnéaires et de logements et l’exploitation pétrolière en mer ont endommagé les écosystèmes d’une richesse exceptionnelle.

A l’inverse, «un site du Patrimoine mondial peut devenir un levier de développement économique», fait valoir l’ONG en citant en exemple la gestion du récif de Tubbataha aux Philippines (pêche, tourisme) ou celle du parc national du Chitwan au Népal, dont la moitié des recettes est reversée aux communautés locales.

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