Venezuela: face à la crise, le président augmente l`essence de 6.000%
Le prix de l`autre type d`essence, celle à l`indice d`octane de 91 appelée "normale", passera à 1 bolivar (0,1 dollar). La hausse de ce qui était le carburant le moins cher du monde est donc de 1.328,5% pour le "normal" et de 6.085% pour le "super".
Cette mesure, reportée à plusieurs occasions par le président Maduro, est considérée comme un sujet ultra sensible, tant le souvenir du "Caracazo" reste vif. C`est le nom des émeutes meurtrières déclenchées en 1989 lorsque le gouvernement d`alors avait annoncé une hausse des prix à la pompe.
Les prix des carburants étaient gelés depuis le milieu des années 1990 et aucun gouvernement n`avait osé briser ce tabou.
"J`appelle à la paix et au respect de ces décisions nécessaires. L`heure est venue d`installer un système qui garantisse l`accès aux hydrocarbures à des prix justes", a jugé le président Maduro.
A la pompe mercredi soir, les automobilistes disaient comprendre cette mesure même s`ils redoutaient l`inflation qu`elle pourrait provoquer.
Richard Rodriguez, responsable d`une coopérative à Caracas, a déjà fait ses comptes : "Avant, je faisais mon plein avec un bolivar (0,10 dollar), désormais, ça va m`en coûter 60 (6 dollars). Cela va nous obliger à augmenter nos tarifs", pronostique-t-il.
Dévaluation de 37%
Le Venezuela, qui importe la quasi-totalité de ce qu`il consomme, contrôle la valeur de la monnaie nationale.
M. Maduro a annoncé une réforme du complexe système de changes du pays, qui à compter de vendredi comportera deux catégories au lieu de trois.
Dans la première, "le "système de change protégé" pour les biens de première nécessité (aliments, médicaments, etc.), un dollar s`échangera désormais contre 10 bolivars, contre 6,3 auparavant, ce qui équivaut à une dévaluation de 37%.
La seconde catégorie est "flottante", à partir de 200 bolivars pour un dollar.
Les différents systèmes de changes, auquel vient s`ajouter le marché noir où le dollar s`échange contre un peu plus de 1.000 bolivars, n`ont pas pu empêcher l`envol d`une inflation parmi les plus élevées au monde - 141,5% sur un an en septembre 2015 - et un PIB attendu en recul de 8% cette année par le Fonds monétaire international (FMI).
M. Maduro a également annoncé une hausse de 20% du salaire minimum, qui passera de 9.600 à 11.520 bolivars (1.152 dollars au nouveau taux officiel le plus bas et 11,50 dollars au marché noir).
Revenant sur l`accord de mardi entre l`Arabie saoudite, la Russie, le Venezuela et le Qatar pour geler la production pétrolière afin de stabiliser les prix qui se sont effondrés ces derniers mois, Nicolas Maduro s`est refusé à "crier victoire".
Si cette mesure devrait "impacter de manière positive les prix très bas du pétrole", le président a appelé de ses voeux une "nouvelle alliance" entre les pays membres de l`Opep et ceux qui n`appartiennent pas au cartel "pour repenser la façon dont nous produisons, accédons au marché et dont les prix sont fixés".
Un objectif déterminant, a-t-il reconnu, pour son pays qui tire 96% de ses devises du pétrole. Les revenus du Venezuela issus du pétrole sont passées de 42 milliards de dollars en 2013, à 12,5 en 2015, soit une chute de 70%, a ajouté Maduro.
Après les déclarations de l`Iran qui a apporté son soutien à cette décision de gel de la production pétrolière, les cours du pétrole ont nettement progressé mercredi.
Mais pour l`économiste Asdrubal Oliveros, "une dévaluation ou une hausse des prix de l`essence ne sont pas des mesures qui sortiront le Venezuela de la crise. Il en faut bien plus".
Depuis l`installation début janvier du Parlement, désormais contrôlé par l`opposition, les blocages institutionnels se multiplient au Venezuela.