La rapport a finalement été publié, mais tout juste avant le début du week-end en Europe et avec certaines critiques à l'égard du gouvernement chinois modifiées ou supprimées, un signe de la position d'équilibriste que Bruxelles tente de maintenir alors que la crise sanitaire brouille les relations internationales.
Aucun commentaire n'a pu être obtenu dans l'immédiat auprès de la mission diplomatique chinoise auprès de l'UE, tandis que le ministère chinois des Affaires étrangères n'a pour l'heure pas répondu à des questions transmises par fax.
Une porte-parole de l'UE a indiqué que le bloc ne «commente jamais le contenu ou le contenu présumé d'échanges diplomatiques internes avec nos partenaires d'autres pays».
D'après un autre représentant de l'UE, interrogé par Reuters, le rapport sur la désinformation a été publié comme prévu. Il a nié que le contenu du document a été édulcoré.
Quatre sources diplomatiques ont déclaré que le document devait initialement être diffusé le 21 avril, mais que sa publication a été retardée après que des représentants chinois ont pris connaissance d'un article du site d'information américain Politico mentionnant des éléments du rapport.
Un haut représentant chinois a alors contacté des représentants européens à Pékin le jour même pour leur dire que, «si le rapport est tel que décrit et qu'il est publié aujourd'hui, cela sera très mauvais pour la coopération», montre une correspondance diplomatique européenne dont Reuters a pris connaissance.
Selon cette correspondance, le haut représentant du ministère chinois des Affaires étrangères Yang Xiaoguang a déclaré que la publication du rapport mettrait Pékin «très en colère» et a accusé les représentants européens de chercher à contenter «quelqu'un d'autre» - un commentaire que les diplomates européens ont interprété comme une référence à Washington.
Les quatre sources ont dit à Reuters que cela avait provoqué le report de la publication du document. La version finale diffusée vendredi soir présente par ailleurs des différences avec une version initiale du rapport que Reuters a obtenue.
Dans la première page du rapport interne partagé avec les gouvernements de l'UE le 20 avril, la branche diplomatique du bloc déclarait par exemple: «La Chine a continué d'organiser une campagne mondiale de désinformation pour détourner les reproches sur la propagation de l'épidémie et améliorer son image internationale. Des tactiques manifestes et clandestines ont toutes deux été observées».
Le résumé public diffusé vendredi sur le portail de désinformation de l'UE, euvsdisinfo.eu, attribue la désinformation à des «sources» soutenues par «différents gouvernements, dont la Russie et - dans une moindre mesure - la Chine». Il est effectivement fait mention de «preuves importantes d'opérations dissimulées chinoises sur les réseaux sociaux», mais cette référence est repoussée aux six derniers paragraphes du document.
La question de la désinformation sur le coronavirus est devenu un point de tension entre les Etats-Unis et la Chine, des représentants des deux camps s'étant réciproquement accusés de cacher des informations sur l'épidémie. Cette querelle entre Washington et Pékin a parfois placé les Européens au milieu. L'UE est le principal partenaire commercial de la Chine, avec plus d'un milliard d'euros d'échanges bilatéraux quotidiens, tandis que la Chine se trouve seulement derrière les Etats-Unis comme principal marché pour les biens et services européens.
Dans un webcast vendredi avec le groupe de réflexion Friends of Europe, l'ambassadeur chinois auprès de l'UE, Zhang Ming, a déclaré que «la désinformation est un ennemi pour nous tous et elle doit être traitée par nous tous».
Reuters