François Hollande, un président «normal» pour la Françafrique

  22 Octobre 2015    Lu: 818
François Hollande, un président «normal» pour la Françafrique
Appelé à la rescousse par l`opposition au Congo-Brazzaville après la mort de plusieurs manifestants, le président Français reste fidèle à sa ligne de non-ingérence politique directe
Denis Sassou Nguesso sait qu’il n’a rien à attendre de François Hollande. Le chef de l’Etat sortant du Congo-Brazzaville, à l’origine du référendum prévu dimanche 25 octobre pour changer la Constitution et lui permettre de se représenter, a évidemment en tête le sort de Blaise Compaoré. L’ex-président du Burkina Faso avait été bouté hors de son pays par les manifestants fin octobre 2014, alors qu’il tentait une manœuvre constitutionnelle similaire. Et si cela ne suffisait pas, un autre signal négatif est venu de Paris le 30 septembre. Alors que Brazzaville bruissait déjà d’une possible confrontation meurtrière entre le pouvoir et l’opposition – dont plusieurs leaders sont réfugiés dans l’hexagone – Sassou a de nouveau fait les frais de la justice française. Dans le cadre de l’enquête sur l’affaire dite des «biens mal acquis», plusieurs propriétés appartenant à son neveu ont été saisies. Autant dire que personne, du côté de l’Elysée, ne pleurerait son éventuel départ.

La comparaison entre le Congo-Brazzaville, où plusieurs personnes ont trouvé la mort dans les manifestations cette semaine, et le Mali, qui sera l’objet ce jeudi d’une conférence internationale à l’OCDE présidée par François Hollande, est révélatrice du réalisme au sommet de l’Etat français. Sachant que le péril islamiste et l’emprise du crime organisé sur les économies africaines interdisent la non-ingérence que prônait jadis Lionel Jospin, le locataire de l’Elysée entend jouer, dans la zone d’influence de Paris, un rôle d’ultime arbitre plutôt que de faiseur de rois. Au Burkina Faso, où une partie des forces du dispositif sahélien «Barkhane» est déployée, son attitude a consisté à proposer in extremis à Blaise Compaoré de partir, en lui promettant entre autres le poste de secrétaire général de la francophonie. Une promesse en forme de paravent de la part de «Hollande l’Africain» (Ed. La Découverte): «Sur l’Afrique, le président et son ministre de la Défense, Jean-Yves Le Drian, pratiquent une politique à la fois transparente et cynique juge un officier retraité, vétéran de l’opération «Serval» au Mali. Leur préoccupation essentielle est la stabilité. C’est la Françafrique moins les magouilles politico-financières.»

Les trois exemples de ce réalisme sont le Tchad, la RDC et le Gabon. Dans ces trois pays, les présidents Idriss Deby, Joseph Kabila et Ali Bongo monopolisent le pouvoir et musellent l’opposition. François Hollande avait même, au début de son mandat en octobre 2012, sermonné publiquement Kabila, lui serrant vite la main lors du sommet de la francophonie à Kinshasa. Mais dans les faits, les trois sont devenus indispensables à l’équilibre de la région. Résultat: Idriss Deby s’est même permis, lors du premier Forum sur la paix et la sécurité de Dakar (Sénégal) organisé en novembre 2014, de faire la leçon à la France et d’accuser en public l’OTAN d’avoir «assassiné» le leader libyen Kadhafi.

Preuve de cette approche avant tout militaire, le forum de Dakar aura de nouveau lieu cette année, financé par Paris. Et l’économie de la Françafrique subit aussi le même sort. François Hollande n’a pas, contrairement à Nicolas Sarkozy avant lui, de liens proches avec Vincent Bolloré, acteur major dans les infrastructures portuaires et ferroviaires. Il laisse donc faire, s’assurant que les intérêts vitaux de la France sont préservés du point de vue des approvisionnements pétroliers et des marchés d’équipements. Sur le Continent noir, le président «normal» défend l’ouverture, pas la contestation.

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