Argentine: la victoire probable de la gauche relance l'incertitude sur l'économie

  02 Octobre 2019    Lu: 943
Argentine: la victoire probable de la gauche relance l

A moins d'un mois de l'élection présidentielle en Argentine, analystes et sondages prédisent une confortable victoire au candidat péroniste de centre gauche, Alberto Fernandez, face au libéral Mauricio Macri. Mais la grande inconnue reste l'évolution d'une économie extrêmement instable.

Habituée à des crises économiques récurrentes au cours de son histoire récente, dont la plus grave a conduit le pays au défaut de paiement en 2001, l'Argentine se retrouve une fois encore dans une situation très vulnérable et personne ne semble connaître la recette pour renverser la tendance.

Le président sortant de centre droit, Mauricio Macri, engagé dans un programme d'ajustement budgétaire dans le cadre d'un accord conclu en 2018 avec le Fonds monétaire international (FMI), expérimente dans les deniers mois de son mandat des mesures qu'il avait jusque-là dédaignées, telles que le contrôle des changes et de certains prix.

Son principal concurrent, Alberto Fernandez, qui fut l'ancien chef de cabinet du président de gauche Nestor Kirchner (2003-2007) lorsque l'Argentine avait suspendu ses relations avec le FMI, ne cesse de répéter qu'il n'y aura pas de cessation de paiements sous sa présidence.

Mais ni l'un, ni l'autre ne se risque à donner des détails sur son programme économique. Cette incertitude maintient les marchés en alerte et le FMI n'a toujours pas annoncé de date pour le prochain décaissement d'une tranche de 5,4 milliards de dollars, sur un prêt total de 57 milliards, initialement prévu en septembre.

L'économie argentine est en récession depuis 2018, marquée par une inflation galopante (30% entre janvier et août), et la pauvreté touche 35% de la population, chiffre le plus alarmant depuis la crise de 2001. Les prévisions pour 2020 ne sont guère meilleures : selon l'agence de notation Moody's, la récession va se poursuivre et l'inflation atteindra 40% d'ici la fin de l'année.

- Défi politique -

Depuis les primaires du 11 août, sorte de répétition générale du scrutin du 27 octobre où le candidat de centre gauche a obtenu 47% des voix, très loin devant Mauricio Macri (32%), les réserves internationales du pays ont fondu de 66 milliards de dollars à 49 milliards. Le peso, déjà affaibli, a encore perdu 20%, l'inflation s'est accélérée. La dette frôle désormais les 100% du PIB.

Pour faire face à cette situation, "il faut beaucoup de consensus et du pouvoir politique, le soutien du Parlement et des gouverneurs. C'est un défi plus politique qu'économique", estime l'économiste Martin Vauthier, du cabinet Ecogo.

Selon lui, "le prochain gouvernement va avoir besoin d'un programme crédible qui lui permette de faire baisser l'indice de risque du pays", actuellement au-dessus des 1.200 points, pour retrouver la confiance des investisseurs.

Analyste chez Moody's Argentine, Gabriel Torres rappelle : "tous les pays émettent une dette et ensuite pour payer cette dette, ils émettent une autre dette (...) Cela signifie que ce qui est important, ce n'est pas ce qui est dû, mais l'accès aux marchés. C'est ça, la clef".

La principale réussite économique du gouvernement de Mauricio Macri est toutefois la baisse du déficit budgétaire, qui devrait s'élever à 0,5% fin 2019. "Si le prochain gouvernement ne tend pas à l'équilibre budgétaire et souhaite financer les dépenses publiques avec des émissions monétaires, nous nous acheminons vers une inflation à trois chiffres", met en garde l'économiste Ramiro Castineira.

Selon Moody's, la dépense publique en Argentine est passée de 25% du PIB au début des années 2000 à 40% actuellement. Les retraites et les programmes d'aides sociales représentent 60% de cette dépense, soit environ 2.000 milliards de pesos (34 milliards de dollars).

M. Fernandez propose aux syndicats et aux mouvements sociaux une trêve de 180 jours pour relancer l'industrie, et ainsi la croissance économique. M. Macri demande, lui, un vote de confiance pour pouvoir poursuivre sa politique d'austérité qui, assure-t-il, portera rapidement ses fruits.

"Si les politiques de stabilité macro-économique se poursuivent, malgré d'autres axes politiques et d'autres priorités, l'économie se rétablira lentement. Mais cela nécessite de la continuité : le problème, c'est que l'Argentine n'en a jamais connue", résume Gabriel Torres. (AFP)


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