Migrants: Merkel inflexible face à la fronde conservatrice
Toute la semaine, les frondeurs se sont pourtant évertués à convaincre la dirigeante allemande de changer le cap, arguant qu`au lieu d`attendre une improbable solution à l`échelle européenne et internationale, elle devrait, comme l`Autriche mercredi, drastiquement limiter le nombre de demandeurs d`asile qui seront acceptés en 2016.
Mardi, ce sont une quarantaine de députés de la CDU de Mme Merkel qui pour la première fois ont signé noir sur blanc un appel «urgent (à) revenir sur l`actuelle politique d`immigration», le pays ne pouvant supporter, selon eux, l`arrivée d`un million de migrants comme en 2015.
Mais la chancelière ne veut lâcher que le minimum de lest. Si elle a accepté après les violences du Nouvel An à Cologne de faciliter les expulsions d`étrangers condamnés, sur le fond elle ne bouge pas: on ne ferme pas les frontières, il en va de la survie du rêve européen.
On verra
Restant sur son mantra «Nous y arriverons», Mme Merkel pense pouvoir réduire l`afflux des migrants et sauver la libre-circulation en Europe en poussant pour une meilleure protection des frontières extérieures de l`UE, et en améliorant les conditions de vie dans les camps de réfugiés de Syriens, notamment en resserrant les liens avec la Turquie.
Mme Merkel a ainsi jugé crucial d`attendre les résultats de sa rencontre vendredi avec le Premier ministre turc Ahmet Davutoglu, puis d`une conférence de donateurs sur la Syrie le 4 février à Londres et enfin d`un sommet européen au milieu du mois prochain.
«C`est après ça qu`on pourra faire un bilan intermédiaire, qu`on verra où l`on en est», a-t-elle déclaré jeudi, avant d`affronter à huis clos des élus de la CSU bavaroise qui réclament un plafond de 200.000 réfugiés par an.
Or plus personne ne semble croire en une solution européenne, nombre d`Etats de l`UE rejetant l`appel à la solidarité de Mme Merkel sur les réfugiés et dont les arrivées, même en hiver, se comptent par milliers chaque jour.
Et la chancelière a d`autres défis encore sur son calendrier, avec en mars trois régions allemandes qui élisent leur parlement. Or les sondages président un recul de la CDU, une défiance accrue des Allemands à l`égard de la politique de la chancelière sur les migrants et une montée des populistes de l`AfD.
Merkel est-elle encore la bonne personne?
Enfin, les bisbilles internes viennent aussi nourrir le mécontentement chez les sociaux-démocrates (SPD), partenaire de la chancelière dans le gouvernement de grande coalition.
«Ce chaos au sein de l`Union (chrétienne) doit cesser, sinon la crise des réfugiés va se muer à la fin en crise gouvernementale», a jugé un haut responsable du SPD, Thomas Oppermann, accusant les détracteurs de la chancelière de «semer systématiquement la panique et l`hystérie».
La vice-présidente de la CDU Julia Klöckner a aussi laissé éclater sa colère contre les frondeurs conservateurs : «qu`ils ferment un peu leur clapet !».
Même si Mme Merkel n`a aucun concurrent sérieux pour lui ravir la chancellerie, à gauche comme à droite, des grands médias commencent à néanmoins s`interroger sur son avenir.
L`édition dominicale du quotidien populaire Bild titrait ainsi en Une: «Merkel est-elle encore la bonne?», sous-entendu la bonne personne pour le poste.
Die Welt estime lui jeudi qu`il est temps pour Merkel d`annoncer son «plan B» car son «plan pour une solution pan-Européenne à la crise a échoué».
Et le journal économique Handelsblatt est lui pessimiste pour la chancelière : «Obama a gagné sa première élection avec son +Yes we can+, Merkel pourrait perdre son poste avec son +Nous y arriverons+».
Dans ce contexte, le porte-parole de la chancelière Steffen Seibert n`a eu qu`un mot pour les journalistes lui demandant si Angela Merkel s`inquiétait pour son avenir à la chancellerie : «Nein!».