Ce montant, dont Volkswagen assume la plus grande part, traduit une forte accélération des efforts entrepris par le secteur automobile pour réduire sa dépendance aux énergies fossiles. Cette transition, encouragée par des politiques publiques de lutte contre la pollution et le changement climatique, devrait aussi favoriser une montée en puissance des équipementiers asiatiques, notamment les fournisseurs de batteries et de technologie électrique.
La Chine a tenté pendant des décennies de rattraper son retard sur les constructeurs allemands, japonais et américains qui ont dominé l'ère du moteur à combustion. Pour les dirigeants du secteur, elle est maintenant bien placée pour profiter de l'avènement programmé de la voiture électrique.
"L'avenir de Volkswagen se jouera sur le marché chinois", affirme ainsi Herbert Diess, président du directoire du constructeur allemand, qui dispose depuis longtemps de coentreprises avec deux des principaux constructeurs chinois, SAIC Motor et FAW Car.
Selon Herbert Diess, qui s'exprimait en début de semaine devant un petit groupe de journalistes à Pékin, la Chine "va devenir l'une des principales puissances automobiles dans le monde". "Ce que nous trouvons (en Chine), c'est vraiment le bon environnement pour développer la prochaine génération de voitures et nous trouvons les bonnes compétences, que nous n'avons que partiellement en Europe et ailleurs", détaille le patron de VW.
"Il y a une politique très claire définie ici en Chine. Responsables politiques et autorités réglementaires exigent" un basculement vers la voiture électrique, souligne-t-il.
TOURNER LA PAGE DU DIESEL
Les 300 milliards de dollars prévus par les grands constructeurs pour la production en série de véhicules électriques en Chine, en Europe et en Amérique du Nord représentent un montant supérieur aux économies de l'Egypte ou du Chili. Il y a un an seulement, ces projets d'investissements ne s'élevaient qu'à 90 milliards de dollars.
A lui seul, Volkswagen devrait assumer près d'un tiers de ces dépenses, environ 91 milliards de dollars, alors que le groupe allemand s'efforce de tourner définitivement la page du coûteux scandale des émissions polluantes de ses moteurs diesel.
Les ambitions de Volkswagen passent par des capacités de production sur trois continents en vue de parvenir à 15 millions de véhicules électriques en 2025, avec 50 modèles entièrement électriques et 30 hybrides. L'objectif final du groupe allemand est de proposer une version électrique de l'ensemble des 300 modèles de ses 12 marques, dont Audi et Porsche.
L'effort prévu par Volkswagen dépasse de loin celui de ses concurrents, Daimler, le plus proche d'entre eux, ayant prévu de consacrer 42 milliards de dollars à cette transition. General Motors, le premier constructeur américain, a pour sa part avancé un montant total de 8 milliards de dollars à la fois pour l'électrification de sa gamme et le développement des véhicules autonomes.
Côté français, les investissements annoncés par Renault s'élèvent à environ 10 milliards de dollars et ceux de PSA à moins d'un milliard. Les deux constructeurs sont notamment associés au chinois Dongfeng.
Environ 45% des projets d'investissements du secteur en la matière, soit plus de 135 milliards de dollars, se concrétiseront en Chine, qui a mis en place des quotas, des instruments de crédit et des incitations financières pour favoriser la production et la vente de véhicules électriques sur son marché.
JEU D'ALLIANCES
L'analyse de Reuters se fonde sur les budgets d'investissements et d'achats rendus publics ces deux dernières années par 29 grands constructeurs mondiaux. Les montants effectivement dépensés pourraient être plus élevés.
"Il y a eu une accélération" des investissements, constate Alexandre Marian, directeur exécutif du cabinet AlixPartners et co-auteur en 2018 d'une étude prévoyant un montant global de dépenses dans les véhicules électriques de 255 milliards de dollars jusqu'en 2023 de la part des constructeurs et équipementiers automobiles.
Alexandre Marian souligne que les acteurs de l'automobile cherchent aussi à nouer davantage d'alliances et de partenariats pour supporter ce fardeau financier.
Ces accords, tels que celui qui pourrait être annoncé par Volkswagen et Ford la semaine prochaine au salon de Detroit, devraient être les principaux soutiens à l'innovation.
Volkswagen est "en train d'évoluer d'un modèle dans lequel nous développons et apportons la technologie européenne sur ce marché à une nouvelle phase dans laquelle nous codéveloppons une partie de la technologie automobile en Chine pour le reste du monde. Je crois que c'est un changement majeur", dit Herbert Diess.
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