L`Afrique se tourne vers la finance islamique

  16 Octobre 2015    Lu: 865
L`Afrique se tourne vers la finance islamique
Cette finance "altruiste", "équitable" et "morale" serait selon les experts une aubaine pour le développement en Afrique.

En Afrique, beaucoup de personnes physiques et morales continuent à tourner le dos au système bancaire et financier classique, et à bouder ses services qui ne "répondent pas à leurs attentes ni à leurs convictions religieuses", eux ce sont des milliers de musulmans africains.

En Afrique de l`ouest par exemple où 90% de la population est musulmane, le taux de pénétration de la finance islamique, inspirée de la "Chariaa" demeure faible, ne dépassant pas la barre des 1% de l`activité globale du secteur financier africain, selon les estimations les plus récentes, bien que non exhaustive étant donnée l’absence de statistiques précises en la matière.

Pourtant et tel que confirmé par des spécialistes de la question, la finance islamique qui s`inspire des règles de la charia (jurisprudence islamique)et se définit comme une finance éthique, se présente comme une alternative de choix pour booster le développement et mobiliser l`épargne dans les pays du continent noir.

"Aujourd`hui, tout le monde a compris que la finance islamique est la finance de demain. D`ailleurs, beaucoup de pays sur le continent africain la réclament, surtout en Afrique de l`Ouest", a expliqué à Anadolu, Mouhamadou Lamine Mbacké,​ président-directeur général de l’Institut africain de la finance islamique, précisant que: " la finance islamique est morale. Elle repose sur des principes de partage, de profits et colle aux traditions africaines de solidarité et d’entraide, ce dont l`Afrique a besoin".

Par ailleurs et au delà des questions d`ordre religieux, la finance islamique fait ses preuves à l`échelle mondiale et est identifiée par nombre de spécialistes de la question comme une alternative de choix pour contourner les risques liés à la spéculation qui a provoqué en 2008, une des plus graves crises financières dans le monde.

Selon le cabinet d`audit financier, Ernest and Young, ce modèle se rattache à d`importantes perspectives de développement et mobilisera d`ici 2025, des actifs d`environ 4000 milliards de dollars, en 2013 ce volume était de 1800 dollars.

De son côté l`agence de notation Standard & Poor’s (S&P) a estimé dans un récent rapport dédié à la question que « Les règlementations et les incitations fiscales pourraient accélérer le développement de la finance islamique en Afrique et précisé que, « l’Afrique occupe encore une place très marginale », dans les émissions de sukuks souverains.

« La moyenne mondiale est de 100 milliards de dollars par an sur les cinq dernières années contre 1 milliard de dollar US émis par les Etats africains », a encore précisé l’agence de notation.

Consciente des défis qui se posent face à la finance islamique, l’Institut africain de finance islamique a, durant les dernières années, multiplié les initiatives ciblées visant à développer de manière optimale ce secteur. Selon un récent communiqué, depuis 2010, cet institut aura organisé trois grands forums sur la finance islamique au Sénégal et formé près de 700 experts dans le domaine,

Tout récemment c`est la Côte d`Ivoire qui a tenu son premier forum dédié à la finance islamique ( le 17-18 septembre) , le but étant tel que spécifié par le ministère ivoirien du Plan et du développement, organisateur de l`évènement, à favoriser le développement de la finance islamique en Côte d’Ivoire et en Afrique à travers un débat et une réflexion ciblés tout en mobilisant les instruments nécessaires pour ce faire.

Le ministre ivoirien du Plan et du Développement et Gouverneur en exercice de la banque islamique de développement (BID), Abdallah Mabri Toikeusse a, rappelé que "les investissements islamiques ont la caractéristique d’être extrêmement mobilisables et particulièrement adaptées aux actions de développement avec leur faible coût et leur caractère altruiste».

Il a, par ailleurs, noté que la Côte d’Ivoire s’apprêtait à émettre ses premiers Sukuk d’un montant de 350 milliards de FCFA (700 millions de dollars US) avec l’appui de la Banque islamique de développement (BID).

Le premier ministre ivoirien, Daniel Kablan Duncan, a, de son côté, souligné que « le secteur de la finance islamique offre d’excellentes perspective pour le continent Africain, que nos Etats se doivent de saisir », et annoncé que le gouvernement ivoirien travaille en partenariat avec la société islamique pour le développement du secteur privé (Sid), à l’élaboration d’un programme quinquennal de mobilisation de ressources sous forme de Sukuk.

Interrogé par Anadolu, Madani Tall, ex-Directeur des opérations de la Banque Mondiale en Côte d’Ivoire, a expliqué que "le financement islamique est un financement alternatif et un complément aux financements classiques. Il est prometteur pour l’Afrique »

Egalement présent au forum d’Abidjan, Khaled Al Aboudi, directeur général de la société islamique pour le développement du secteur privé (SID) a annoncé que cette filiale de la Banque islamique de développement (Bid) « consacrera 30 % de ses financements à l’Afrique d’ici cinq ans contre 13% actuellement ».

Le Niger pays où 95 % de la population (17,1 million) est de confession musulmane avait émis en février dernier ses premiers sukuk d’une valeur de 260 millions USD emboitant le pas à deux autres pays d’Afrique subsaharienne à savoir le Sénégal et l`Afrique du Sud qui ont respectivement émis, pour la première fois en 2014 des sukuks souverains d`une valeur de 200 millions USD et 500 millions USD.

Conforme à la recommandation religieuse issue du Coran qui interdit aux fidèles directement le prêt à intérêt (Ribaa). Le Sukuk consiste pour la banque à acheter un bien et à le revendre immédiatement à un prix majoré au client, qui rembourse alors selon un échéancier sur lequel les deux parties se sont entendues.

Principal acteur mondial en la matière, la Banque Islamique de Développement (BID), organisme qui se veut une Banque mondiale pour les pays musulmans, compte, sur ses 55 pays membres, 22 pays africains dont 17 d`Afrique subsaharienne.

Pour renforcer sa présence en Afrique subsaharienne, la BID a créé un Programme Spécial pour le Développement de l’Afrique doté d’un portefeuille de 12 milliards de dollars sur la période 2008-2012 pour financer divers secteurs dont l’agriculture, l’énergie, le transport, l’éducation.

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