Nasa : la sonde qui va frôler le Soleil

  01 Juin 2017    Lu: 1972
Nasa : la sonde qui va frôler le Soleil
L'agence spatiale américaine vient de présenter une mission prévue pour l'été prochain en direction de l'atmosphère solaire. Une grande première.
Se rapprocher de Jupiter, plonger dans les anneaux de Saturne, atterrir sur Mars, cela semble presque banal aujourd'hui. Mais le Soleil, lui, on l'observe de loin. Les satellites tentant de comprendre en détail les mystères de son fonctionnement se tiennent à une distance prudente. Jusqu'à l'année prochaine. La Nasa vient en effet de révéler les derniers détails d'une mission qui s'envolera l'été prochain, et qui va plonger dans l'atmosphère solaire.

La Parker Solar Probe, c'est son nom, va se rapprocher du Soleil sept fois plus près qu'aucun engin humain avant elle. La petite sonde, elle est haute de seulement 3 mètres, doit effectuer en tout 24 fois le tour de l'astre diurne en s'en rapprochant de plus en plus, jusqu'à arriver à une distance de seulement 6,2 millions de kilomètres. En plein dans la couronne solaire.

Avec l'aide de Vénus

Pour réussir un tel exploit, elle devra être protégée des radiations et de la chaleur, qui ira jusqu'à 1.377 degrés à l'extérieur. Cela nécessite un bouclier composite en fibres de carbone épais de près de 12 millimètres., spécialement conçu pour l'occasion.

Son lancement est prévu entre le 31 juillet et le 19 août 2018 par une fusée Delta IV Heavy, la plus puissante disponible avant que n'arrivent la SLS des missions martiennes et la Falcon Heavy de SpaceX. Mais cela ne suffira pas : pour maîtriser ses orbites descendantes, elle aura besoin de l'aide de Vénus, qui lui fournira une assistance gravitationnelle à sept reprises. La manoeuvre consiste à utiliser la gravitation de la planète pour ajuster l'orbite de la sonde.

La sonde gagnera en vitesse au fur et à mesure qu'elle sera près du Soleil. Ainsi, lors de son passage le plus proche dans l'atmosphère solaire, elle devrait atteindre les 190 km/seconde.

Mais c'est quoi, le Soleil ?

Imaginez une sphère dans laquelle vous pourriez entasser 1.300.000 planètes Terre et vous aurez une idée de la taille du Soleil, notre étoile. A lui seul, il concentre plus de 99% de la masse totale du système solaire. Mais cette masse, ce sont des gaz : 70% d'hydrogène, 28% d'hélium, les 2% restants étant composés de quelques autres éléments un peu plus lourds. Des gaz qui, dans cet environnement extrêmement chaud, sont transformés en plasma (un état particulier de la matière où les électrons sont arrachés des atomes et où ils forment une espèce de pâte avec les noyaux).

Au centre du Soleil, son coeur est une sorte de gigantesque réacteur à fusion nucléaire, qui transforme l'hydrogène en hélium. L'énergie dégagée par ces réactions atomiques tendrait à disperser la matière dans l'espace, alors que la gravitation engendrée par l'énorme masse les attire au contraire vers son centre. Un équilibre qui explique aussi pourquoi au cours de leur histoire, en fonction de l'évolution de leur masse et des réactions en leur coeur, les étoiles peuvent changer de taille.

Cela peut sembler simple, mais dans la pratique, le Soleil est une mécanique complexe. Autour du coeur, on trouve plusieurs couches aux températures différentes, dans lesquelles se produisent diverses réactions. De plus, le champ magnétique solaire est intense, et génère un système de courants, dont les taches solaires sont l'une des manifestations.

La couche de sa surface, la photosphère, est l'endroit d'où sont émises les particules de lumière qui arrivent jusqu'à nous. Au-delà, c'est l'atmosphère solaire. Il peut sembler étrange de parler de surface pour une boule de plasma, mais cela correspond à une réalité physique que nous pouvons observer notamment pendant les éclipses : ce que l'on voit autour du disque sombre de la Lune, c'est l'atmosphère solaire.

Couronne chaude et vent solaire

La plus grande partie de cette atmosphère, la couronne, est le siège d'un paradoxe encore inexpliqué. La température y augmente en effet avec l'altitude, alors qu'on pourrait penser qu'elle devrait diminuer. Mieux encore, l'atmosphère solaire est beaucoup plus chaude que le Soleil lui-même ! Percer ce mystère fait partie des objectifs de la Parker Solar Probe et des dix instruments scientifiques embarqués à son bord.

Elle se préoccupera également d'un phénomène qui affecte directement la Terre, mais aussi l'ensemble des engins spatiaux envoyés dans l'espace : le vent solaire. Ce flux de protons et d'électrons généré par le Soleil et qui traverse notre système solaire à des vitesses situées entre 300 et 800 km/seconde, est entre autres à l'origine de l'évaporation dans l'espace de l'atmosphère martienne dans un lointain passé.

L'atmosphère terrestre est protégée du vent solaire par le champ magnétique de notre planète, mais cela ne signifie pas qu'il soit complètement sans effet. Les tempêtes solaires peuvent parfois affecter le bon fonctionnement des satellites, par exemple. De plus, lors de telles tempêtes, le vent solaire peut porter avec lui des nuages entiers de plasma, ce que l'on nomme les "éjections de masse coronale", dont les effets pourraient être catastrophiques dans certaines circonstances.

Pour les futurs astronautes quittant la Terre, notamment vers Mars, il sera également capital de se protéger contre les effets du vent solaire, et d'en connaître au mieux l'état. Avoir une météo solaire fiable est donc un objectif scientifique de tout premier ordre, et il se trouve que l'origine du vent solaire et des éjections se trouvent... dans la couronne solaire, la partie extérieure de son atmosphère. L'endroit où la Parker Solar Probe va se rendre, et tenter de comprendre comment naît le vent solaire et ce qui le fait accélérer.

Prévue depuis 60 ans

En annonçant le lancement prochain de la sonde, l'administrateur associé du directorat des missions scientifiques de la Nasa, Thomas Zurbuchen, avait une petite surprise en réserve. Initialement nommée "Solar Probe Plus", elle est désormais rebaptisée "Parker Solar Probe" en hommage au professeur Eugene Parker, celui qui en 1958 avait prédit l'existence du vent solaire. Un honneur qui lui était communiqué quelques jours avant son 90ème anniversaire. "C'est la première fois que nous nommons un engin spatial d'après un chercheur de son vivant", assurait Thomas Zurbuchen. Une autre première pour la Parker Solar Probe, donc.

En fait, la sonde en question faisait partie de recommandations à la Nasa depuis la même époque où Eugène Parker théorisait l'existence du vent solaire, et il a fallu attendre longtemps pour qu'elle puisse être réalisée. Non pas par manque d'intérêt, mais comme l'explique Nicola Fox, responsable scientifique du projet, "les matériaux n'existaient pas".

Le bouclier qui va protéger la sonde est fait d'un matériau composite issu de la recherche financée par la Nasa. Non seulement il doit faire obstacle à la chaleur, mais il doit aussi supporter les alternances de chaud et froid qu'elle subira durant ses 24 orbites l'éloignant et la rapprochant du Soleil. Au plus chaud, lorsqu'il fera 1.300 degrés à l'extérieur, les instruments dans la sonde seront "à la température de la pièce", assure la scientifique.

La Parker Solar Probe représente donc une avancée technologique et scientifique pour mieux connaître le Soleil. Comme le déclarait le professeur Parker, "le Soleil est la seule étoile que nous puissions observer en détail, et les étoiles sont des objets compliqués".

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