Rohani aux pasdarans : ne vous mêlez pas de l'élection

  18 Mai 2017    Lu: 1307
Rohani aux pasdarans : ne vous mêlez pas de l'élection
Le président iranien, Hassan Rohani, a prié mercredi le puissant corps des Gardiens de la révolution islamique (CGRI, pasdarans) et la milice Basij qu'il contrôle de ne pas intervenir dans l'élection présidentielle de vendredi, un avertissement inhabituel qui souligne la tension dans le pays.

Les Gardiens de la révolution, corps qui est à la tête d'un empire économique et financier, font rarement l'objet de critiques publiques en Iran.

Mais le pragmatique président sortant se présente au scrutin face à un adversaire de taille en la personne du religieux fondamentaliste Ebrahim Raisi, qui a apparemment le soutien des pasdarans.

"Nous ne demandons qu'une chose : que le Basij et les Gardiens de la révolution restent à la place qui est la leur (...)", a déclaré Hassan Rohani lors d'un discours de campagne à Mashad, capitale de la province du Khorasan-e Razavi, selon l'Agence de presse iranienne du travail (Ilna).

Le président sortant a rappelé que l'ayatollah Khomeini, le fondateur de la République islamique d'Iran décédé en 1989, avait lui-même évoqué les risques d'une ingérence des forces armées dans la vie politique.

Lors de la présidentielle de 2009, la rumeur avait couru que le CGRI et la milice Basij avaient falsifié les résultats du scrutin en faveur de Mahmoud Ahmadinejad, ce qui avait déclenché un vaste mouvement de protestation dans tout le pays.

Les manifestations avaient fait des dizaines de morts. Ces centaines de personnes avaient été interpellées, selon les organisations de défense des droits de l'homme.

Le guide suprême de la Révolution iranienne, l'ayatollah Ali Khamenei, a déclaré mercredi que le maintien de la sécurité pour l'élection était une priorité.

Il a également jugé indigne le ton particulièrement vif de la campagne, critique à peine voilée à l'adresse de Hassan Rohani, qui s'en est pris avec virulence à Ebrahim Raisi, un protégé du guide suprême.

Mauvais oeil

L'intervention d'Ali Khamenei, à l'avant-veille du scrutin, pourrait influer sur le vote, en donnant à comprendre qu'il voit d'un mauvais œil le comportement du président sortant.

"Au cours des débats électoraux, certains propos tenus ont été indignes de la nation iranienne. Mais la (large) participation de la population fera oublier tout cela", a-t-il dit lors d'un discours, cité sur son site internet.

Les deux principaux rivaux ont échangé des accusations de corruption en direct à la télévision, sur un ton d'une véhémence qui était du jamais vu en près de 40 ans d'histoire de la République islamique.

Ebrahim Raisi accuse Hassan Rohani d'être corrompu et de mauvaise gestion économique. Le président sortant, qui souhaite poursuivre l'ouverture de l'Iran vers l'Occident et assouplir les restrictions pesant sur la société iranienne, accuse en retour son adversaire, qui a été juge pendant plusieurs années, de violations des droits de l'homme.

Ebrahim Raisi a développé une relation de confiance avec certains pasdarans quand il était juge et a de ce fait leur soutien, selon Mohsen Sazegara, membre fondateur du CGRI qui vit aujourd'hui en exil aux Etats-Unis. "Raisi est le candidat des Gardiens de la révolution", dit-il.

Si l'ayatollah Khamenei n'a pas formulé d'accusation ad hominem mercredi, ses critiques semblent viser tout particulièrement Rohani, qui, durant un débat la semaine dernière, est allé au-delà de ce qui est habituellement admis en Iran.

"M. Raisi, vous pouvez me calomnier autant que vous le voulez. En tant que juge d'un tribunal coranique, vous pouvez même ordonner mon arrestation. Mais, s'il vous plaît, ne vous servez pas de la religion pour atteindre le pouvoir !", a dit Hassan Rohani à un moment donné.

A un autre moment, il a lancé ceci à son adversaire : "Certaines organisations révolutionnaires et liées aux services de sécurité acheminent par autocar des gens à vos meetings (...). Qui les paie ?"

En vertu du système politique iranien, Ali Khamenei, qui à 77 ans est guide suprême depuis 1989, a plus de pouvoir que le président mais il est tenu de rester au-dessus de la mêlée.

Il semble aussi soutenir Raisi à la fois en tant que candidat, mais aussi en tant qu'éventuel successeur.

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