Maladie de Parkinson: un lien établi avec l'exposition aux pesticides

  30 Mars 2017    Lu: 1569
Maladie de Parkinson: un lien établi avec l'exposition aux pesticides
Alors que le lien entre l'exposition professionnelle aux pesticides et la survenue de la maladie de Parkinson tend à se confirmer, une nouvelle étude montre que la population générale pourrait elle aussi encourir un risque accru lorsque l'activité agricole est dense autour de lieux d'habitation.
La maladie de Parkinson est la deuxième maladie neuro-dégénérative la plus fréquente, après la maladie d’Alzheimer. Dans la plupart des cas, elle trouve son origine dans une combinaison de facteurs de risque génétiques et environnementaux. Parmi les facteurs d’environnement suspectés, des études épidémiologiques ont montré une association entre la survenue de la maladie et une exposition professionnelle aux pesticides.

En 2009, une équipe de chercheurs de l’Inserm a montré dans une étude que l’exposition aux pesticides double quasiment ce risque parmi les agriculteurs. Un risque qui augmente avec le nombre d’années d’exposition et qui serait principalement lié à l’usage d’insecticides. Au-delà du rôle de l’exposition aux pesticides en milieu professionnel, ces résultats soulevaient déjà la question des conséquences d’une exposition à plus faibles doses.

Une nouvelle équipe de l'Inserm a cette fois mené une étude sur l'impact d'une exposition non professionnelle à ces composés. Ils ont étudié le nombre de nouveaux cas diagnostiqués en fonction de l'importance de l'activité agricole dans chaque canton français, utilisée comme indicateur de l’utilisation de pesticides. Leur conclusion: "l'incidence de la maladie de Parkinson serait d'autant plus élevée que les activités agricoles sont développées localement. Le risque serait maximal dans les territoires où la viticulture est fortement présente".

De l'agriculture traditionnelle à la population générale

Dans le cas de la maladie de Parkinson, une population spécifique de neurones est progressivement détruite, conduisant à des symptômes spécifiques (tremblement, lenteur et troubles de la coordination). Des travaux menés sur des cellules et des animaux ont déjà permis d'établir comment les pesticides favorisent cette neurodégénérescence, et les données sont suffisamment solides pour qu'elle soit inscrite au tableau des maladies professionnelles chez les agriculteurs.

Mais en ce qui concerne la population générale, le travail était plus délicat. "La maladie est relativement rare et nous ne disposons pas de moyens simples pour recenser les cas diagnostiqués", explique Alexis Elbaz, qui a dirigé l'étude. Les auteurs se sont donc fondés sur le nombre de personnes nouvellement traitées par des médicaments antiparkinsoniens dans chaque canton français, entre 2010 et 2012, à partir de données issues de l’Assurance maladie.

Ils ont ensuite utilisé le recensement agricole national conduit par le ministère de l'Agriculture, en 1988 puis en 2000, pour caractériser l'activité agricole sur chacun de ces territoires. Ainsi, ils ont pu décrire l'association existant entre le nombre de cas de maladie de Parkinson et l'importance et la nature de l'activité agricole. D'autres variables pouvant influencer la survenue de la maladie (tabagisme, ensoleillement, niveau socio-économique) ont été prises en compte.

Un sur-risque possible mais modéré

Les chercheurs ont constaté que le nombre de nouveaux cas annuel dans chaque canton est associé à la proportion de surface des cantons allouée à l’agriculture. "Plus cette dernière est élevée, plus le nombre local de cas est important. Et avec certaines cultures, comme la viticulture, l’association semble plus prononcée" précise Alexis Elbaz. La corrélation la plus forte est en effet celle liée à la présence la plus élevée de vignobles: elle augmentait l'incidence locale de la maladie d’environ 10%.

Cette association est retrouvée dans différentes régions viticoles et les données vont dans le même sens lorsque les agriculteurs et les travailleurs agricoles sont exclus de l'analyse. Enfin, la relation entre l'activité viticole et la maladie de Parkinson est plus marquée chez les plus de 75 ans, en comparaison des sujets plus jeunes, quelle que soit la population analysée.

"Peut-être les personnes les plus âgées ont-elles été exposées plus longtemps que les autres, notamment à des pesticides toxiques qui sont aujourd'hui interdits, comme les organochlorés. Par ailleurs, il est possible que le poids des facteurs environnementaux soit plus important après 75 ans, tandis que la susceptibilité génétique pourrait jouer un rôle plus important pour les cas survenant chez les plus jeunes", ajoute Alexis Elbaz.

Ce dernier met cependant en garde sur l'interprétation des données. En effet, si une activité agricole importante dans les régions rurales serait donc associée à une augmentation de l'incidence de la maladie de Parkinson, il faudrait pouvoir confirmer ce sur-risque par d'autres études. "Des études conduites à partir de données individuelles et non pas, comme ici, de données groupées par canton", précise-t-il.

D'autres travaux doivent aussi être menés pour évaluer les pesticides les plus à risque pour ainsi les écarter de la population d'agriculteurs, comme la population générale. "On dispose souvent de données sur la toxicité aigüe des produits chimiques, mais celles concernant leur neurotoxicité font souvent défaut", conclut le chercheur. En 2009, la première équipe de l'Inserm soulignait quant à elle l'importance de l’éducation des utilisateurs professionnels de pesticides à un meilleur usage et la mise en place de mesures de protection des travailleurs agricoles.

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