Turquie: un millier de manifestants à Istanbul contre l`incarcération de deux journalistes
«La liberté d`expression est l`un des principes fondamentaux de l`Union européenne», a expliqué Maja Kocijancic lors d`un point de presse à Bruxelles. Les deux dirigeants du journal d`opposition turc Cumhuriyet sont accusés d`«espionnage» et «divulgation de secrets d`Etat» pour avoir publié en mai un article sur de possibles livraisons d`armes par les services secrets turcs (MIT) à des islamistes en Syrie.
Les manifestants, des journalistes, élus de l`opposition et intellectuels, ont hurlé des slogans hostiles au président Recep Tayyip Erdogan et à son Parti de la justice et du développement (AKP, islamo-conservateur). «Tous ensemble contre le fascisme», «Tayyip menteur» ou «l`AKP complice de Daech», ont-ils scandé.
Can Dündar, le rédacteur en chef de Cumhuriyet, et Erdem Gül, le chef de son bureau à Ankara, ont été inculpés jeudi soir par un tribunal stambouliote d«espionnage» et de «divulgation de secrets d`Etat» et écroués.
En mai dernier, le journal avait diffusé des photos et une vidéo de l`interception, en janvier 2014 à la frontière syrienne, de camions appartenant aux services secrets turcs (MIT) transportant des armes destinées à des rebelles islamistes syriens.
L`affaire a provoqué un scandale en Turquie. Le gouvernement turc a toujours nié soutenir les rebelles extrémistes, dont le groupe Etat islamique (EI), et répété que le convoi intercepté contenait une «aide» destiné aux populations turcophones de Syrie.
M. Erdogan a lui-même personnellement porté plainte contre M. Dündar.
L`incarcération des deux journalistes intervient alors que la Russie a accusé la Turquie d`entretenir des liens avec les jihadistes, après l`incident aérien mardi au cours duquel Ankara a abattu un avion militaire russe près de la frontière syrienne.
M. Erdogan a qualifié jeudi ces accusations de «calomnies» et de «mensonges», affirmant notamment que son pays n`achetait pas de pétrole à l`EI.
Au pouvoir depuis treize ans, l`actuel gouvernement turc est régulièrement épinglé dans les capitales étrangères et par les ONG de défense de la liberté de la presse, qui lui reprochent ses pressions de plus en plus importantes sur les médias.