L’expression est d’autant plus taboue en Allemagne qu’elle a des conséquences juridiques importantes, puisque le commandement des armées passe, en cas de conflit armé, du ministre de la défense à la chancellerie.
Quant à l’expression « guerre totale », employée par Nicolas Sarkozy, elle renvoie pour tout Allemand à la formule, datant de 1943, de Joseph Goebbels, ministre de la propagande d’Adolf Hitler, et n’est même pas concevable dans un cadre démocratique.
Hostilité de l’opinion
De plus, jusqu’ici, Mme Merkel s’est montrée très réservée sur les engagements extérieurs de la Bundeswehr. Contrairement au président de la République, à Frank-Walter Steinmeier, au ministre des affaires étrangères (SPD), et à Ursula von der Leyen, la ministre de la défense (CDU), la chancelière n’a pas pris part au débat, au début de 2014, sur le supposé grand retour de l’Allemagne sur la scène internationale. Ou, si retour il y a, il ne faut surtout pas penser qu’il va essentiellement concerner un rôle accru de la Bundeswehr à l’étranger.
Deux arguments expliquent la réserve de la chancelière : l’hostilité de l’opinion allemande face à ce type d’intervention, et surtout la conviction qu’aucune intervention militaire ne résout à elle seule un conflit. Les situations de la Libye et de l’Afghanistan le prouvent. C’est la position actuelle de l’Allemagne sur la Syrie : ce conflit nécessite l’engagement de toutes les parties – Bachar Al-Assad fait donc, comme Moscou, partie de la solution –, et il ne pourra pas être résolu par le seul recours à la force.
Eviter de trop s’engager
Mardi, à Bruxelles, lors du conseil européen de la défense, il était frappant de voir comment Mme von der Leyen était physiquement proche de Jean-Yves Le Drian, son homologue français – impossible de ne pas penser à la photographie montrant Mme Merkel s’appuyant sur l’épaule de M. Hollande après les attaques de janvier – tout en évitant de trop s’engager au côté de la France.
L’Allemagne propose à ce stade de ne renforcer sa présence qu’au Mali, où elle compte deux cents instructeurs mais seulement neuf soldats dans le cadre de la mission des Nations unies dans le pays (Minusma) exposée à un certain danger. Mardi, Mme von der Leyen a fait valoir que la France « n’avait fait aucune demande concrète ».
Si nul ne croit en Allemagne que la France peut vaincre seule l’EI, une partie de la presse juge cependant que le gouvernement allemand pourrait l’aider davantage qu’il s’apprête à le faire. « L’EI doit aussi être combattu militairement », affirme ainsi le quotidien Süddeutsche Zeitung mardi.
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