La Russie voit déjà la France se tourner vers Moscou

  29 Novembre 2016    Lu: 1139
La Russie voit déjà la France se tourner vers Moscou
Médias et conservateurs russes jubilent après la victoire de François Fillon à la primaire de la droite. Avec en arrière-pensée, la question de la levée des sanctions.

Le Kremlin a accueilli avec retenue la victoire de François Fillon aux primaires de la droite et du centre. « Le président Poutine a déjà exprimé son attitude à l’égard des primaires [françaises] en répondant récemment aux questions des journalistes. Moscou suit les processus électoraux dans d’autres pays, y compris en France, avec respect et à la distance requise », a indiqué lundi le porte-parole du Kremlin Dmitri Peskov, interrogé sur une éventuelle préférence de Vladimir Poutine.

Le président russe n’a nul besoin d’afficher publiquement sa préférence, et risquer une situation embarrassante en cas d’échec. Ses lieutenants, les médias d’État et leurs commentateurs attitrés se chargent de diffuser un message sans ambiguïté.

Estampillé « candidat favori du Kremlin », l’ancien premier ministre français a très bonne presse en Russie, grâce à ses relations cordiales avec Vladimir Poutine, sa volonté de lever les sanctions contre la Russie et une convergence sur le dossier du terrorisme islamiste.

Sputnik, l’agence de communication internationale du Kremlin, n’hésitait pas à manier l’ironie, en titrant : « Quand Poutine remporte la primaire en France », et en raillant les « médias internationaux » qui voient partout la « main du Kremlin ». Une ironie voilant à peine la satisfaction de voir des adversaires frustrés « Et puis si un candidat soutient Moscou, que faire, enrager et crier sa colère ? », poursuit l’auteur anonyme.

Jubilation des conservateurs

À Katehon, un think-tank ultra-conservateur et proche du Kremlin, la jubilation ne se cache pas derrière un miroir : « primaire en France : nouvelle victoire de Poutine » titre une publication sur le site de l’organisation. « Victoire de Fillon – défaite des Atlantistes » signale une autre analyse s’appuyant sur les déclarations du président du Comité d’information du Conseil fédéral russe, Alexeï Pouchkov. « Si Fillon gagne, le tandem Berlin – Paris se dissoudra, en ce qui concerne la Russie. Merkel ne se retrouvera plus qu’avec la Pologne et les pays Baltes. Ce sera presque la solitude », se réjouit d’ores et déjà Pouchkov.

Quasiment tous les commentateurs pro-Kremlin estiment que les dés sont joués et que le camp honni du président Hollande n’a aucune chance. « La France va radicalement se tourner vers Moscou en mai 2017 avec une probabilité de 90% », prédit le politologue Sergeï Markov. Il se dit presque certain de voir s’affronter au second tour des présidentielles « deux amis de Moscou : François Fillon et Marine le Pen. Tous deux sont des adversaires des sanctions et des partisans de la souveraineté de la France face à Washington, Berlin et Bruxelles ».

Des relais LR solides à Moscou

Des positions que les représentants russes du parti Les Républicains ne démentiront pas. Une soixantaine de leurs membres ont fêté la victoire de leur candidat préféré François Fillon, dans un hôtel de luxe situé juste en face du Kremlin. Parmi eux, Emmanuel Quidet, président de la Chambre de commerce et d’industrie franco-russe (dont le conseil économique est co-présidé par l’oligarque et ami de Vladimir Poutine Guennadi Timtchenko) et Philippe Pégorier, responsable du parti pour les « relations gouvernementales Russie », directeur d’Alstom en Russie et ancien président de l’Association of European Business.

Les deux hommes d’affaires défendent avec véhémence la politique du Kremlin et s’opposent avec tout autant de fermeté aux sanctions économiques contre la Russie. Leur loyauté n’est pas passée inaperçue : ils ont tous deux été décorés par le ministre des affaires étrangères Sergueî Lavrov pour « leur action au service de la coopération internationale ». Philippe Pégorier a en outre été décoré cet été de « l’ordre de l’amitié » par le président Poutine lui-même. François Fillon dispose donc de relais solides auprès du Kremlin. À moins que ce ne soit l’inverse.

Par : Emmanuel Grynszpan | EurActiv.fr

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