Chicago veut durcir les peines de prison

  20 Novembre 2016    Lu: 1147
Chicago veut durcir les peines de prison
Avec une hausse de 56% des meurtres en un an, Chicago est en passe de battre des records de violence et les élus envisagent de durcir les peines d`emprisonnement pour contrer un fléau ravivant le passé tumultueux de la troisième ville des Etats-Unis.
Pour certains, cette réponse sécuritaire n`est cependant pas celle à apporter dans une ville où 668 meurtres ont été commis entre janvier et mi-novembre, selon la police. D`ici la fin décembre, 2016 pourrait devenir l`année la plus meurtrière depuis 1998 pour la mégalopole où sévissait le gangster Al Capone à la fin des années 1920.

Les origines de cette violence se trouveraient ainsi dans la grande pauvreté de certains quartiers, dont ceux du célèbre "Southwest side" où Alicia Means réside avec ses enfants, entourée de nombreuses maisons abandonnées. Durant sa jeunesse, l`endroit était "joli et propre (...), les gens prenaient soin des enfants des autres", se souvient cette quadragénaire qui a pris l`habitude de se jeter au sol, chez elle, dès qu`elle entend des coups de feu, par crainte des balles perdues.

Avec la crise économique de 2008, "ce qui a changé, c`est le chômage, l`absence de moyens, les gens qui perdent leur maison (...), qui n`ont plus les moyens de payer leurs factures", raconte cette mère de famille. Récemment encore, la scène devenue banale s`est répétée: la police afflue vers le domicile d`un jeune des quartiers sud-ouest abattu près de chez lui, et des cris perçants commencent à résonner, dans ce secteur tout proche du centre-ville et de ses gratte-ciel ; la famille vient d`apprendre la mort du garçon de 21 ans à l`hôpital.

"J`ai honte"

"J`ai vu trop de vies disloquées. Trop de parents perdre un enfant", se désolait récemment lors d`un forum public le chef de la police Eddie Johnson. "En tant qu`habitant de Chicago, j`ai honte, car nous pourrions faire mieux", soulignait M. Johnson, dont les services estiment que quelque 1.400 délinquants récidivistes, pour beaucoup membres de gangs ou trafiquants de drogues, sont responsables de l`essentiel des violences.

"Nous sommes plus que frustrés", explique Anthony Guglielmi, porte-parole de la police. "Car on pourrait réduire la violence dans la ville de 40% simplement en maintenant en prison les criminels", poursuit-il. C`est à cet effet qu`Eddie Johnson et des parlementaires de l`Etat de l`Illinois veulent durcir les peines des personnes arrêtées plusieurs fois pour des infractions impliquant des armes à feu.

Une proposition de loi doit être examinée par le parlement local dans les semaines à venir et devrait recevoir l`appui d`élus des deux partis. Elle prévoit de demander aux juges d`ordonner pour les récidivistes des peines d`emprisonnement dans la tranche haute des 3 à 14 ans recommandés, ou à défaut de s`expliquer par écrit. Un durcissement de la législation reste difficilement envisageable au niveau national, mais le gouverneur républicain de l`Illinois, Bruce Rauner, semble aller dans le sens d`une réforme dans son Etat. - "

"Lancer une tendance"

Plus tôt cette année, il a notamment signé une loi renforçant les sanctions sur le trafic d`armes à feu en provenance de l`Indiana et du Wisconsin voisins, où la législation est plus souple. "L`Illinois peut véritablement lancer une tendance", selon Michael Zalewski, un élu démocrate au parlement local. "Nous devons faire quelque chose", juge pour sa part son collègue républicain Michael Connely, appuyant lui aussi la proposition de loi.

Pour Alex Kotlowitz, auteur d`un livre sur la pauvreté infantile à Chicago, le traumatisme de précédents heurts et plusieurs facteurs socio-économiques expliquent la concentration de la violence dans certaines parties de la ville. Mais l`allongement des peines de prison ne lui semble pas être une solution pour des communautés majoritairement noires qui ont "déjà connu des peines toujours plus longues pour tous les crimes imaginables". "Le fait que c`est la première solution qui soit évoquée me semble tout simplement décevant", avance-t-il.

Conscient de cet écueil, le chef policier Eddie Johnson, lui-même noir, a assuré qu`il voulait se focaliser "sur les individus dont nous savons qu`ils mènent la violence". "La dernière chose que je souhaite faire, c`est d`emprisonner quelqu`un en raison de sa couleur de peau ou de son adresse", a-t-il insisté.

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