Nathalie Kosciusko-Morizet: Il a fallu envisager une perpétuité réelle pour les terroristes

  19 Juillet 2016    Lu: 980
Nathalie Kosciusko-Morizet: Il a fallu envisager une perpétuité réelle pour les terroristes
La députée de l’Essonne et candidate à la primaire de la droite, Nathalie Kosciusko-Morizet, sort de son silence observé depuis l’attentat de Nice. L’ancienne ministre de l’Ecologie propose quatre grands axes pour lutter contre le terrorisme
Vendredi, j’ai revu un couple rencontré après les attentats de novembre. Ils ont perdu un fils au Bataclan. Ils étaient calmes, incroyablement calmes. Avec l’horreur de Nice, ils revivaient leur histoire. Ils n’avaient pas de mots. Il n’y avait pas de mots. Le même jour, comme chacun, j’ai écouté la télé, la radio. Et là j’ai trouvé qu’il y avait trop de mots. J’ai dû attendre pour écrire.

Il y avait les mots d’un Président qui se réfugie derrière une évidence – le risque zéro n’existe pas – et ne sait pas reconnaître l’échec. Mais près de 250 morts en dix-huit mois, comment faut-il l’appeler ? Il y avait aussi les mots des commentateurs et des polémistes.

Pourtant l’expérience devrait nous instruire : après les attentats de novembre, nous avons sombré dans la querelle sur la déchéance de nationalité – débat sans fin et finalement sans suite. J’ai combattu cette idée. Ne nous engageons plus dans l’impasse des propositions symboliques, ni dans l’écoute de solutions extrémistes qui feraient de notre France une terre sans valeurs.

Pour vaincre, dans cette guerre asymétrique, je propose 4 axes stratégiques :

1. La guerre est d’abord chez nous. Là doit être notre priorité. Ne laissons pas croire aux Français que c’est sur le seul front irako-syrien que nous gagnerons cette guerre, c’est faux. Les chefs islamistes manipulent des esprits faibles. Ils prospèrent sur la radicalisation. Nous devons donc mener la guerre sur deux fronts : contre les têtes pensantes et contre la radicalisation qui leur sert de terreau.

2. Contre les chefs islamistes, notre arme c’est le renseignement. Notre dispositif est défaillant sur des sujets sensibles, comme le renseignement pénitentiaire ou territorial. Nous manquons aussi de technicité face à un ennemi agile qui sait bien user du digital. Il nous faut une agence de renseignement technologique unique, sur le modèle de la NSA aux Etats-Unis. Nous manquons enfin d’une politique européenne. Voilà un sujet sur lequel l’Europe pourrait se rendre indispensable, alors qu’elle traverse une crise de légitimité.

3. Neutraliser ce qui nourrit Daech et lutter contre la radicalisation, c’est rendre le salafisme illégal et faire naître un islam de France, respectueux de la République. Je souhaite mettre en place une redevance sur le halal, pour mobiliser des financements nationaux et interdire définitivement ceux des pays du Golfe. Il faut par ailleurs créer une formation publique obligatoire des imams, pour proscrire à terme les prêcheurs qui n’auraient pas cette qualification. Lutter contre la radicalisation, c’est s’occuper aussi sérieusement de ce qui se passe en prison. Et d’abord construire 20 000 nouvelles places. Au cours des derniers mois, j’ai visité des centrales. On y sépare les détenus. On ne les isole pas. Et on les déradicalise moins encore. Sans nouvelles places, rien n’est possible.

4. Enfin, donnons aux Français les moyens de se mobiliser pour notre sécurité à tous. Cultivons la résilience et la cohésion de notre Nation. Je propose l’instauration d’un service national court. On y apprendrait les gestes qui sauvent et ceux qui permettent de se défendre. Ce serait un sas pour la réserve opérationnelle. Et celle-ci relaierait le dispositif Sentinelle qui épuise nos armées et leur fait jouer un rôle de « police passive » qui n’est pas le leur. Bien sûr, une telle mesure a un coût. Qui ne devrait en aucune manière amputer le budget de nos armées, déjà insuffisant au regard de leurs engagements.
La liberté, aussi, a un coût. Mais elle n’a pas de prix.

Nathalie Kosciusko-Morizet est députée LR de l’Essonne

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