Des applications médicales
Les scientifiques du MIT espèrent avec cette trouvaille apporter une solution de soin efficace aux millions de personnes souffrant de maladies de peau telles que le psoriasis, la dermatite et l’eczéma atopique. « Ce système, qui consiste à mélanger deux crèmes dont une à base de polymères, permet de former comme un pansement très fin et indétectable à la surface de la peau », explique le Dr Catherine Olivères-Ghouti, dermatologue à Paris.
Une formule imperméable qui assure une meilleure hydratation de la peau et à laquelle il sera possible, c’est ce sur quoi planchent les scientifiques, d’adjoindre des médicaments. « Cela pourrait être intéressant à l’avenir : une plaie guérit mieux en milieu humide et ce dispositif garantit une protection temporaire qui favorise la cicatrisation », note le Pr Louis Dubertret, professeur de dermatologie, ancien chef du service dermatologie de l’Hôpital Saint-Louis à Paris et auteur de Psoriasis (éd. Med’Com). Et s’il est un jour possible d’administrer des médicaments grâce à cette seconde peau en silicone, « cela permettra d’obtenir un effet réservoir, pour diffuser lentement et en continu les traitements, par exemple à base de corticoïdes, dans l’épiderme », poursuit ce spécialiste du psoriasis, qui a déjà collaboré avec les chercheurs du MIT.
Quelques réserves
Pour l’heure, la mise sur le marché de ce produit à destination des personnes souffrant de pathologies dermatologiques n’est pas à l’ordre du jour. Mais faut-il déjà y voir un remède miracle ? « Ce n’est pas révolutionnaire », tranche le Pr Dubertret. « Le MIT travaille sur un dispositif qui existe déjà : des pansements en silicones sont disponibles depuis longtemps sur le marché. » « Mon médecin m’a déjà prescrit ces pansements chargés de principes actifs, lorsque j’ai eu de fortes poussées », raconte Samantha, la trentaine, qui vit avec son psoriasis depuis l’adolescence. « Ça m’a évité de mettre des crèmes grasses qui tachent les vêtements », poursuit la jeune femme.
Pour autant, si la « seconde peau » du MIT était mise sur le marché, quelques réserves émergent. « Je ne suis pas sûre que le dispositif, qui s’applique en deux temps, intéressera ceux qui ont des affections dermatologiques chroniques », doute le Dr Olivères-Ghouti. « Ça dépend du pourcentage de psoriasis que l’on a sur le corps », confirme Samantha. « Si on n’a quelques plaques de psoriasis, pourquoi pas, mais si on a la moitié du corps recouverte, ce n’est pas gérable, j’aime autant mettre ma crème, cela ne prend que quelques secondes », estime la jeune femme, qui « ne veu [t] pas que [s] on traitement vire à la contrainte ».
Des progrès et des interrogations
Si cette « seconde peau » n’est pas une révolution, « elle constitue un progrès », consent Louis Dubertret. « C’est une avancée sur le plan de la galénique, qui est l’art d’envelopper le médicament. Cela ne changera pas forcément les traitements, mais cela pourrait permettre d’améliorer le confort de certains patients, dont l’affection chronique peut êtreincommodante au quotidien, par exemple pour quelqu’un qui a de l’eczéma sur les mains », détaille-t-il.
L’autre application de cette invention est, quant à elle, d’ordre cosmétique. « L’effet tenseur que ce dispositif a sur les rides va assurément intéresser les laboratoires », prédit le Pr Dubertret. Or « l’application cosmétique de cette découverte risque de tirer les prix vers le haut », craint le Dr Olivères-Ghouti, qui s’interroge sur l’accessibilité de ce traitement potentiel pour les patients atteints de maladies dermatologiques. « Les patients seront intéressés par ce produit s’il est efficace et remboursé », insiste-t-elle, « et d’ici là, d’autres traitement, oraux notamment, auront sans doute émergé ». La réponse à toutes ces questions ne sera pas connue avant plusieurs années.
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