Jusqu’à cette année, la question du nucléaire, presque tabou, était très peu évoquée lors des conférences mondiales sur le climat. Les bouleversements géopolitiques mondiaux et les questions de souveraineté énergétique qui en découlent ont vraisemblablement contribué à changer la donne.
«Nous savons par la science, la réalité des faits et des preuves qu'on ne peut pas atteindre la neutralité carbone d’ici 2050 sans nucléaire», a ainsi affirmé John Kerry, l'émissaire américain pour le climat en lançant officiellement cette initiative en compagnie de plusieurs dirigeants dont le président français et le premier ministre belge Alexander De Croo. Parmi les signataires figurent encore la Bulgarie, le Canada, la Finlande, le Ghana, la Hongrie, le Japon, la Corée du Sud, la Moldavie, la Mongolie, le Maroc, les Pays-Bas, la Pologne, la Roumanie, la Slovaquie, la Slovénie, la Suède, l'Ukraine, la République tchèque et le Royaume-Uni. Toutefois la Chine et la Russie, importants constructeurs de centrales nucléaires dans le monde, ne comptent pas parmi les signataires.
Neutralité carbone
«La déclaration reconnaît le rôle clef de l'énergie nucléaire dans l'atteinte de la neutralité carbone d'ici 2050 et pour conserver l'objectif de (limiter le réchauffement à) 1,5°C à portée de main», indique le texte qui n’est évidemment pas contraignant. Le document «invite [notamment] les actionnaires de la Banque mondiale, des institutions financières internationales et des banques régionales de développement à encourager l'intégration de l'énergie nucléaire dans la politique de prêt de leurs organisations».
«L’énergie nucléaire est une énergie propre, je tiens à le répéter», a déclaré Emmanuel Macron, rappelant qu’elle produit environ 70% de l’électricité en France. Il faut désormais «réfléchir à comment accompagner les pays qui veulent changer leur mix énergétique», explique-t-on dans l’entourage du président. Tous les pays ne peuvent pas le faire, et «ce serait absurde en termes de sécurité» mais les pays qui souhaitent s’engager doivent pouvoir «bénéficier du soutien de la communauté internationale pour le faire de manière fiable».
Cet appel est lancé alors que l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA) organise en mars prochain à Bruxelles un sommet présenté comme la réunion au plus haut niveau jamais consacrée exclusivement au thème de l'énergie nucléaire civile. Le monde compte aujourd’hui environ 400 réacteurs répartis dans une trentaine de pays. Pour atteindre la neutralité carbone en 2050, l'Agence internationale de l'énergie (AIE) table au moins sur un doublement des capacités de production nucléaire.
Certains défenseurs de l'environnement mettent cependant en garde contre les risques d'accident, la question des déchets sur le très long terme ou encore les coûts élevés de l'atome. «La France a pris une position ridicule et l'a fait partager par 19 autres pays», a pour sa part réagi le leader de La France insoumise Jean-Luc Mélenchon sur France Inter, critiquant «la tête d'œuf qui a trouvé ça». «Quand ça se réchauffe, ça réchauffe l'eau, et par conséquent on ne peut pas refroidir» les installations nucléaires, a-t-il souligné.
Un autre appel de pays, plus consensuel, est lancé ce samedi :le triplement des capacités d'énergies renouvelables (solaire, éolien, hydroélectricité, biomasse...) d'ici à 2030, avec cette fois 110 pays, dont l'UE et les pays du G20.
AFP
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