La France rappelle ses ambassadeurs aux USA et en Australie

  18 Septembre 2021    Lu: 788
  La France rappelle ses ambassadeurs aux USA et en Australie

La France a rappelé pour consultations ses ambassadeurs à cause de la «gravité exceptionnelle» de l'annonce du partenariat stratégique entre Washington, Londres et Canberra.

L'ambassadeur de France aux États-Unis, Philippe Etienne, a été rappelé vendredi soir à Paris pour consultations, de même que son homologue en Australie, Jean-Pierre Thébault.

«Cette décision exceptionnelle est justifiée par la gravité exceptionnelle des annonces effectuées le 15 septembre par l'Australie et les États-Unis», a dit dans un communiqué le ministre des Affaires étrangères, Jean-Yves Le Drian. «L'abandon du projet de sous-marins de classe océanique qui liait l'Australie à la France depuis 2016, et l'annonce d'un nouveau partenariat avec les États-Unis visant à lancer des études sur une possible future coopération sur des sous-marins à propulsion nucléaire, constituent des comportements inacceptables entre alliés et partenaires, dont les conséquences touchent à la conception même que nous nous faisons de nos alliances, de nos partenariats et de l'importance de l'indopacifique pour l'Europe», a aussi dit le ministre.

Washington a réagi dans la soirée assurant «avoir été en contact étroit» avec Paris. «Nous regrettons qu'ils aient franchi ce pas, toutefois nous resterons engagés dans les jours à venir pour résoudre nos différends», a ainsi déclaré un responsable de la Maison-Blanche. «Nous espérons pouvoir continuer notre discussion sur ce sujet à haut niveau dans les prochains jours, y compris à l'Assemblée générale de l'Onu la semaine prochaine» à New York, a déclaré le porte-parole de la diplomatie américaine, Ned Price, dans un tweet. Il a ajouté «comprendre leur position», et a pris acte de la décision sans précédent de Paris.

Il ne faut pas sous-estimer les dommages causés à la confiance envers des alliés. » ( Une source diplomatique)

Le rappel d'un ambassadeur est une procédure rarement utilisée envers un proche allié. Jeudi soir, l'ambassade de France à Washington avait déjà annulé une soirée de gala qui devait célébrer l'alliance entre les États-Unis et la France. Le secrétaire d'État, Antony Blinken, avait tenté jeudi de faire retomber la tension en expliquant pendant une conférence de presse avec le secrétaire à la Défense, Lloyd Austin, et leurs homologues australiens, combien la France «est un partenaire essentiel» dans la région indopacifique. «Nous avons été en contact avec nos homologues français au cours des dernières 24-48 heures pour discuter de l'AUKUS, y compris avant l'annonce», a avancé Blinken. «Je laisserai à nos partenaires australiens le soin de décrire pourquoi ils ont préféré une nouvelle technologie. Mais comme le président l'a dit, et je veux le souligner à nouveau, nous coopérons de manière incroyablement étroite avec la France sur de nombreux dossiers communs dans la région indopacifique, mais aussi au-delà, dans le monde entier. Nous allons continuer à le faire. Nous accordons une valeur fondamentale à cette relation».

Un degré de défiance rare
Selon des sources diplomatiques, Paris n'aurait pourtant eu vent de l'accord que quelques heures avant son annonce, par des fuites dans la presse australienne et américaine. Jake Sullivan, le conseiller à la sécurité nationale de Joe Biden, l'aurait finalement confirmé aux Français un peu avant que la création de l'AUKUS ne soit rendue publique. Même dans le jeu parfois brutal des négociations internationales, le coup est apparu comme dépassant ce qui se fait entre pays alliés. «Il ne faut pas sous-estimer les dommages causés à la confiance envers des alliés», a expliqué une source diplomatique.

Par une certaine ironie, la soirée de gala annulée vendredi soir devait célébrer la bataille de la Chesapeake, remportée le 5 septembre 1781 par la flotte française de l'amiral de Grasse sur les Britanniques. Cette victoire navale avait permis de remporter le mois suivant celle de Yorktown, après un siège mené pour l'essentiel par des troupes terrestres françaises, et qui avait permis l'indépendance des États-Unis. Dans son allocution mercredi, Joe Biden a préféré faire allusion aux combats livrés ensemble par les États-Unis, l'Australie et le Royaume-Uni depuis un siècle.

Il faut remonter aux années 2003-2004 pour retrouver le même degré de défiance entre Paris et Washington, les Américains ayant reproché à l'époque aux Français leur manque de soutien à leur invasion de l'Irak.

Le Figaro


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