Un premier vol passager international quitte Kaboul depuis le retrait américain

  10 Septembre 2021    Lu: 1469
Un premier vol passager international quitte Kaboul depuis le retrait américain

Il s'agit du premier vol de ce type depuis le gigantesque pont aérien organisé par les Américains, plus de  plus de 123.000 personnes ont été évacuées

Un premier vol passager international a quitté Kaboul jeudi, depuis le chaotique retrait américain d'Afghanistan fin août, où il faut «maintenir un dialogue avec les talibans» pour éviter «des millions de morts», selon le secrétaire général de l'Onu Antonio Guterres.

Le vol Qatar Airways à destination de Doha s'est déroulé alors que le nouveau pouvoir des talibans s'organise, moins d'un mois après la marche victorieuse de ses combattants sur Kaboul après l'effondrement du gouvernement pro-occidental à la mi-août.

Il s'agit du premier vol de ce type depuis le gigantesque pont aérien organisé par les Américains, qui a permis l'évacuation de plus de 123.000 personnes.

Près de 40 citoyens américains avaient été invités mais seuls 21 ont embarqué, a précisé Ned Price, porte-parole du Département d'État. «Bien sûr nous aimerions voir plus de vols de cette nature», a-t-il dit.
À bord se trouvaient également 43 Canadiens et 13 Néerlandais.

Implication du Qatar
Parmi les passagers, un Afghan-Américain a expliqué à l'AFP, sous couvert de l'anonymat, avoir été informé à la dernière minute par le Département d'État américain: «Ils m'ont appelé ce matin et m'ont dit de me rendre à l'aéroport», témoigne-t-il, avant d'embarquer avec sa famille.

Doha est très impliqué dans cette opération comme dans la relance de l'aéroport de Kaboul, qui a fermé après le retrait américain et tarde à rouvrir aux vols réguliers.

«Nous espérons que dans un futur proche l'aéroport sera prêt pour toutes sortes de vols commerciaux», a déclaré le porte-parole du gouvernement taliban, Zabihullah Mujahid.

La Qatar et son alliée la Turquie travaillent depuis plusieurs jours pour préparer les structures aéroportuaires de Kaboul à une réouverture progressive.

Une tâche compliquée, tant l'aéroport a souffert des évacuations chaotiques de la fin août, menées alors que des milliers d'Afghans faisaient le siège de l'enceinte dans l'espoir de monter dans un des vols affrétés par les pays étrangers.

Washington reconnaît qu'il reste encore à exfiltrer beaucoup d'Afghans menacés pour avoir travaillé avec l'ancien gouvernement ou les pays occidentaux.

Les talibans «ont fait preuve de flexibilité et ils ont été professionnels dans nos échanges avec eux dans cet effort. C'est un premier pas positif», a salué la Maison Blanche jeudi.

Le secrétaire général de l'Onu Antonio Guterres est allé jusqu'à plaider jeudi, lors d'un entretien avec l'AFP, pour que la communauté internationale entretienne «un dialogue» avec les talibans en Afghanistan, où il faut éviter une «dégringolade économique» avec «des millions de morts» de faim.

«Jusqu'à présent, dans les discussions que nous avons eues, il y a au moins une réceptivité pour discuter», a assuré M. Guterres, qui n'exclut pas de se rendre un jour en Afghanistan si les conditions sont réunies.

En revanche, l'émissaire de l'Onu en Afghanistan, Deborah Lyons, a affirmé jeudi devant le Conseil de sécurité que les talibans avaient perpétré des assassinats depuis leur retour au pouvoir, malgré leur promesse d'amnistie.

«Il y a des allégations crédibles sur des meurtres de représailles de membres des forces de sécurité et de détention de responsables ayant travaillé pour de précédents gouvernements», a-t-elle dit.

Elle a néanmoins appelé la communauté internationale à maintenir les flux d'aide vers l'Afghanistan, avertissant que dans le cas contraire, l'économie du pays pourrait s'effondrer.

Sans aide, l'Afghanistan vivra une «grave récession économique qui pourrait entraîner des millions de personnes dans la pauvreté et la faim, et pourrait créer une vague massive de réfugiés», a prévenu Deborah Lyons.

Les islamistes travaillent à la consolidation de leur pouvoir, à quelques jours du 20e anniversaire des attentats du 11 septembre 2001 aux États-Unis, point de départ de l'invasion occidentale du pays qui a chassé les talibans du pouvoir.

Mercredi, le nouveau gouvernement taliban, nommé la veille, a donné un tour de vis pour éteindre la contestation en publiant un ordre indiquant que tout rassemblement devrait désormais être autorisé à l'avance par le ministère de la Justice et qu'aucun ne l'était pour l'heure.

La menace semble avoir porté: plusieurs manifestations ont été annulées jeudi à Kaboul après l'annonce du gouvernement.

Jeudi, on remarquait dans les rues de Kaboul davantage de talibans armés que les jours précédents, dont des membres des forces spéciales en treillis, à des coins de rue et sur les barrages placés sur les grandes artères.

Ces derniers jours, plusieurs rassemblements de centaines de personnes pour la défense des libertés, donc de défiance à l'égard des talibans, ont été dispersés par des combattants armés talibans, notamment dans la capitale Kaboul, à Mazar-i-Sharif (Nord), Faizabad (Nord-Est) et Hérat (Ouest), où deux personnes ont été tuées et plusieurs blessées par balle.

Mercredi soir, deux journalistes de l'Etilaat Roz («Jour d'info»), l'un des principaux quotidiens afghans, avaient montré à l'AFP leurs corps meurtris, couverts d'énormes hématomes violacés après une manifestation à Kaboul.

Ils avaient raconté à l'AFP comment les talibans les avaient empêchés de filmer ou de photographier une marche de femmes, avant de les emmener au poste et de les tabasser pendant plusieurs heures «à coups de pied, de bâtons, de câbles, de tuyaux, de tout ce qu'ils pouvaient trouver».

Les talibans ont annoncé leur gouvernement de transition à quelques jours du 20e anniversaire des attentats du 11-Septembre.

Malgré leurs promesses d'ouverture, il est surtout composé de cadres ultra-conservateurs de la génération qui avait imposé un régime rigoriste et brutal entre 1996 et 2001 - dont quatre passés par la prison américaine de Guantanamo - et ne comporte aucune femme. Plusieurs ministres figurent sur des listes de sanctions de l'ONU.

Sputnik


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