Brésil: pour ses fidèles, Bolsonaro fait un sans-faute face au coronavirus

  03 Juillet 2020    Lu: 627
  Brésil:   pour ses fidèles, Bolsonaro fait un sans-faute face au coronavirus Un supporter de Jair Bolsonaro portant un masque à l'effigie du président lors d'un rassemblement à Rio de Janeiro, le 7 juin 2020. CARL DE SOUZA / AFP

Pendant que la courbe des morts du coronavirus montait en flèche au Brésil, celle de la cote de popularité de Jair Bolsonaro restait horizontale: pour ses fidèles, le président fait un sans-faute face à la crise sanitaire.

Pourtant, la minimisation par le chef de l'État de la gravité du coronavirus, une «petite grippe» qui a fait près de 62.000 morts, lui vaut depuis trois mois une avalanche de critiques. De même que son opposition farouche aux mesures de confinement.

Tant les épidémiologistes que l'Organisation mondiale de la Santé (OMS) se sont inquiétés de cette position, jugée criminelle par certains, alors que le Brésil est le deuxième pays au monde où le Covid-19 tue le plus, derrière les États-Unis. Mais selon l'institut de sondage Datafolha, 32% de la population estimait fin juin que le gouvernement de Bolsonaro est «bon ou très bon», un chiffre stable depuis le début de la crise sanitaire.

Pour Vinicius Valle, chercheur en sciences politiques, la plupart des sympathisants du président reconnaissent l'existence du danger sanitaire. Mais leur opposition au confinement de la population et à la paralysie d'une économie déjà promise à une récession record l'emporte sur le reste, estime le chercheur, co-auteur d'une étude sur le bolsonarisme publiée en juin.

«Les gens souffrent beaucoup financièrement. Et quand Bolsonaro dit "on ne peut pas empêcher le Brésil de fonctionner", il parle au désespoir des gens», dit M. Valle. Mais ce ne sont pas les mêmes personnes qu'avant la pandémie qui soutiennent Bolsonaro, dit le chercheur. «Il a perdu des points parmi ceux qui le soutenaient depuis l'élection. Ils ne sont plus que 22% de fidèles», explique-t-il. En revanche «il en a gagné parmi les classes sociales inférieures grâce à l'aide d'urgence de 600 réais» (100 euros), versée à près de 60 millions de Brésiliens.

«Un président patriote»

Presque tous les dimanches, une poignée de bolsonaristes fervents organise des rassemblements à Sao Paulo, comme à Brasilia. Toujours sous les couleurs du drapeau, vert et jaune. Leur rhétorique est calquée sur celle du président.

Ils sont seulement quelques dizaines à se rassembler? C'est la faute des médias, qui sèment la peur pour que les gens ne sortent pas. L'économie s'effondre? C'est à cause des gouverneurs. «Bolsonaro a versé de l'argent à la population et aux États. Mais les gouverneurs des États ont mal géré cet argent, les hôpitaux de campagne tombent en morceaux», affirme Neusa, une Brésilienne qui ne souhaite pas donner son nom complet.

«Il n'était pas nécessaire de fermer quoi que ce soit!», tempête cette quinquagénaire rencontrée à une manifestation pro-bolsonaro. La pauliste ne lâche pas une seconde sa banderole «Fora Doria», «Dehors (Joao) Doria», le gouverneur de l'État de Sao Paulo qui a imposé un confinement.

Un autre manifestant, Lee Freitas, estime que «Bolsonaro prend de sages décisions» et qu'il a «des ministres compétents», même s'il s'est séparé de deux ministres de la Santé en quelques semaines. «Nous soutenons cette gestion. Nous sommes heureux d'avoir un président patriote, applaudi partout où il va», affirme Lee Freitas, à propos du chef de l'État qui se mêle régulièrement aux foules, faisant fi de la distanciation physique.

Complots et fidèles
Le coronavirus, pour certains bolsonaristes, serait aussi le fruit d'une conspiration chinoise. «C'est le résultat d'une stratégie de certains médias, liés à la gauche et au communisme chinois, pour démoraliser les gouvernements conservateurs, comme les gouvernements brésilien et américain», assure Alex Silva, un militant. «Comment expliquer que la Chine n'ait pas connu un nombre explosif de cas de Covid-19 ?», s'interroge-t-il.

Des théories conspirationnistes circulent dans les cercles bolsonaristes, explique Vinicius Valle. «Cependant, les fausses informations les plus négationnistes répandues au Brésil (sur les réseaux sociaux), comme celle qui veut que les autorités locales feraient enterrer des cercueils vides pour gonfler les chiffres (de la pandémie) ne sont pas forcément mises en avant par les bolsonaristes, ce qui montre que peu de gens y adhèrent», précise-t-il. «Dès que l'aide d'urgence prendra fin, la popularité de Bolsonaro devrait diminuer et se limiter à ces 22% de fidèles qui ont voté pour lui et continuent à le soutenir», prévoit enfin l'analyste politique. (AFP)


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