Coronavirus: trouver l'animal coupable, un jeu du chat et de la souris

  07 Février 2020    Lu: 891
  Coronavirus:   trouver l Une chauve-souris rhinolophe suspendue par les pieds. (Michael Fiala Motor / stock.adobe.com)

Quel est l'animal qui a transmis le nouveau coronavirus à l'homme? Pour identifier le suspect, les chercheurs se sont lancés dans une traque méthodique, digne d'une enquête de police scientifique.

L'animal qui héberge un virus sans être malade et peut le transmettre à d'autres espèces est appelé «réservoir». Dans le cas du nouveau coronavirus, il s'agit certainement de la chauve-souris: selon une récente étude, les génomes de ce virus et de ceux qui circulent chez cet animal sont identiques à 96%.

Pour autant, «on pense qu'il y a un autre animal intermédiaire» qui a transmis le virus à l'homme, explique à l'AFP Arnaud Fontanet, de l'institut Pasteur. En effet, les analyses montrent que le virus de chauve-souris n'était pas équipé pour se fixer sur les récepteurs humains. Il est donc sans doute passé par une autre espèce pour s'adapter à l'homme.

On ignore encore quel animal a joué ce rôle d'intermédiaire. L'hypothèse du serpent, d'abord avancée par des chercheurs chinois, a vite été balayée. Vu la nature de ce coronavirus, «l'hôte intermédiaire doit probablement être un mammifère, peut-être un rongeur ou un animal de la famille des blaireaux», selon Arnaud Fontanet.

Les chercheurs pensent que cet animal était vendu dans le marché de Wuhan, ville chinoise d'où est partie l'épidémie. Malgré son nom de «Marché de fruits de mer», nombre d'autres animaux, dont des mammifères sauvages, y étaient vendus pour être mangés. Lors de l'épidémie de Sras (2002-03), également causée par un coronavirus, l'intermédiaire était la civette, mammifère dont la viande est appréciée en Chine.

Trouver le coupable

Il faut recenser tous les types d'animaux vendus dans le marché, et faire des tests pour voir s'ils sont porteurs du virus. Pour cela, on réalise «un prélèvement pharyngé [dans la gorge] et un prélèvement de selles», selon Arnaud Fontanet.

C'est sans doute aussi ce qu'ont fait les chercheurs chinois pour le nouveau coronavirus, d'autant que le marché de Wuhan a été fermé au début de l'épidémie. Fin janvier, les chercheurs chinois sont probablement parvenus par cette méthode à identifier le nouveau coronavirus. Sur le marché de Wuhan, ils affirment avoir réalisé 585 prélèvements sur des étals et dans un camion poubelle du marché, et avoir retrouvé le coronavirus dans 33 d'entre eux.

Trouver l'animal responsable est crucial, car cela doit permettre d'empêcher le virus de réapparaître, une fois que l'épidémie aura été jugulée. Rien ne garantit cependant que la tache sera rapide. «Dans le cas d'Ebola, les recherches du réservoir ont commencé en 1976 et les premiers résultats ont été publiés en 2005», souligne Eric Leroy, virologue et vétérinaire de l'IRD. Pour le virus du sida, le VIH, il aura fallu vingt ans avant d'identifier les grands singes comme responsables.

Et après ?

«Ce sont des contacts animaux sauvages-hommes qui sont à l'origine de ces transmissions, donc il faudrait laisser les animaux sauvages où ils sont», estime Arnaud Fontanet. En conclusion d'une étude publiée lundi dans la revue médicale Nature, des chercheurs chinois ont ainsi préconisé «l'instauration d'une législation stricte contre l'élevage et la consommation des animaux sauvages».

Une mesure transitoire a d'ailleurs déjà été prise: fin janvier, la Chine a interdit le commerce de tous les animaux sauvages en attendant la fin de l'épidémie. «A chaque fois, on cherche à éteindre un incendie et, quand il est éteint, on attend le suivant», déplore quant à lui François Renaud, chercheur au CNRS. Selon lui, il faudrait mettre en place une «veille» pour «cartographier tout ce qui est potentiellement susceptible de transmettre des agents infectieux à l'homme», afin d'avoir «une sorte d'inventaire des risques».Un travail colossal, qui nécessiterait d'importants financements. (AFP)


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