Grève et manifestations massives: la France grogne contre la réforme des retraites

  06 Décembre 2019    Lu: 1537
  Grève et manifestations massives:  la France grogne contre la réforme des retraites

AFP

La France a vécu jeudi une journée de grève et de manifestations massives contre la réforme des retraites, un projet emblématique du quinquennat Macron qui a mis le pays au ralenti et fait descendre plusieurs centaines de milliers de personnes dans les rues, de fortes perturbations étant toujours attendues vendredi.  

Le syndicat CGT a annoncé plus d’un million et demi de manifestants dans toute la France, le ministère de l’Intérieur en a comptabilisé de son côté 806 000, pour cette première journée de grève.     

Gares désertées, écoles fermées, entreprises dépeuplées: le mouvement a été massivement suivi dans tous les secteurs pour dénoncer un projet qualifié d’ « injuste ».     

Sujet éminemment inflammable en France, qui avait déjà été paralysée pendant près d’un mois en 1995 contre une réforme des retraites, la réforme vise à supprimer les 42 régimes existants (général, fonctionnaires, privés, etc...) et créer un système de retraite universel par points. Il survient dans un contexte social déjà très tendu dans plusieurs secteurs (hôpitaux, étudiants..) et dans un pays secoué depuis un an par la contestation inédite des « gilets jaunes ».     

« C’est beau cette manifestation avec les avocats, les gilets jaunes, les soignants, les pompiers, ça fait plaisir », s’est réjoui Pascal Marichala, un chercheur venu en famille à Bordeaux.     

« C’est tout le monde qui est concerné pas seulement une partie de la population », pestait Franck, ouvrier à Rennes. « Personne ne peut imaginer travailler jusqu’à 70 ans ».     

À Paris, traumatisé par les violences lors des manifestations de « gilets jaunes » pendant l’année écoulée, le cortège était encadré par un important service d’ordre syndical et quelque 6000 policiers et gendarmes.     

Des incidents entre casseurs et forces de l’ordre ont éclaté non loin de la place de la République, dans l’est de la capitale et à la fin du cortège place de la Nation. Une remorque de chantier a été retournée et incendiée et plusieurs vitrines brisées tandis que les forces de l’ordre essuyaient des jets de projectiles et répliquaient par des tirs de lacrymogène.     

La police a procédé à une centaine d’interpellations.      

À Toulouse, des échauffourées en fin de manifestation ont fait 5 blessés légers dont trois policiers.     

En dépit des incidents, le premier ministre, Edouard Philippe, a « rendu hommage » aux syndicats, notant que dans « un très grand nombre de villes », les manifestations « se sont bien passées car elles ont été bien organisées ». 

Transports paralysés   

Le chef de file de l’opposition de gauche radicale, Jean-Luc Mélenchon, a estimé que ce 5 décembre marquerait « une date dans l’histoire sociale de ce pays » et assuré que « le bras de fer » ne faisait que commencer.     

Le mouvement a été reconduit dans les transports parisiens, où 10 lignes de métro sur 14 seront de nouveau fermées vendredi, et ferroviaire, où la compagnie SNCF a annoncé l’annulation de 90% des trains à grande vitesse et de 70% des trains régionaux. Le trafic à l’international (Eurostar, Thalys) sera de nouveau très perturbé.     

Dans le secteur aérien, Air France a annulé 30% de ses vols intérieurs et près de 10% de ses vols moyen-courrier pour vendredi, et la direction générale de l’aviation civile a appelé les compagnies aériennes à réduire de 20% leur programme de vol le même jour.     

Les compagnies Transavia, Easyjet et Ryanair ont également annoncé la suppression de plusieurs vols (10 pour Transavia) vendredi.     

Le mouvement touche également les enseignants, les retraités, les étudiants, les avocats, le secteur de l’énergie, ou encore les policiers, qui ont bloqué des commissariats jeudi.     

La tour Eiffel et plusieurs des principaux musées de Paris étaient totalement ou partiellement fermés jeudi. De nombreuses écoles sont restées portes closes.     

À l’origine de la mobilisation, le futur « système universel » de retraites par points, censé remplacer les 42 régimes existants (fonctionnaires, privés, régimes spéciaux, complémentaires). L’exécutif promet un système « plus lisible » et « plus juste », les détracteurs de la réforme s’attendent à une « précarisation » des retraités.     

Marges de négociation  

Le président français a déjà déclaré qu’il ne reconcerait pas à son projet. Il est « déterminé à mener cette réforme, dans l’écoute et la consultation », a affirmé jeudi l’Élysée, précisant que « le premier ministre s’exprimerait vers le milieu de la semaine prochaine sur l’architecture générale de la réforme ».     

Le projet précis n’est en effet pas encore connu et l’exécutif est resté dans le flou sur plusieurs points.     

« Il reste des marges de négociation » d’ici là, a assuré la porte-parole du gouvernement, Sibeth Ndiaye, précisant que le système prendrait en compte les « situations spécifiques », notamment les métiers dangereux et les carrières longues.     

« La concertation n’est pas terminée », a renchéri la ministre de la Transition écologique Elisabeth Borne.     

Plusieurs récents sondages ont montré que le mouvement était majoritairement soutenu par les Français.     

AFP


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