Le Kosovo se dote d'une armée pour affirmer sa souveraineté

  14 Décembre 2018    Lu: 640
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Le Kosovo se dote vendredi d'une armée pour affirmer sa souveraineté, avec le soutien des Américains et au risque d'envenimer ses relations avec la Serbie, qui ne reconnaît pas l'indépendance de son ancienne province. 

"Soldats! Félicitations! Nouvelles missions!": quelques heures avant le vote du parlement kosovar, le président Hashim Thaçi avait revêtu jeudi son treillis pour s'adresser aux forces de sécurité du Kosovo (KSF) aujourd'hui surtout chargées de missions de sécurité civile. 

Assurant qu'elle serait au service de tous les citoyens, quelle que soit leur appartenance ethnique, il entend en faire une véritable armée, une décennie après la proclamation d'une indépendance reconnue selon Pristina par quelque 115 pays.

Celle-ci est rejetée par Belgrade, mais aussi notamment la Russie et la Chine qui ferment au Kosovo la porte de l'Onu.

La Kfor, une force internationale menée par l'Otan, garantit la sécurité et l'intégrité territoriale du Kosovo depuis la guerre entre forces serbes et rebelles kosovars albanais (1998-99, plus de 13.000 morts). 

- "Bonheur extraordinaire" -

Parmi les Kosovars albanais, une unanimité rare a accueilli ce que le quotidien Koha Ditore décrit comme "un vote historique". 

"C'est un bonheur extraordinaire pour les citoyens (...) Cela aurait dû être fait plus tôt, mais ce n'est pas trop tard", commente Hamze Mehmeti, retraité de 67 ans. "Maintenant, nous pouvons dire que nous sommes un Etat. Un Etat sans armée, cela n'existe pas", dit Skender Arifi, un coiffeur de 37 ans.

A Belgrade comme parmi les 120.000 Serbes qui vivent toujours au Kosovo, cette armée est accueillie par un mélange d'inquiétude et de colère. 

"J'espère que si les Albanais (du Kosovo) entreprennent quelque chose contre nous, l'Etat serbe fera quelque chose pour nous protéger", commente Marko Djusic, habitant de Dren, village serbe du nord du Kosovo. 

Cette nouvelle crise intervient dans un contexte tendu, avec un dialogue au point mort depuis des mois, et la mise en place par Pristina en novembre d'une barrière douanière sur les produits serbes. 

Le Kosovo "est mon pire cauchemar, je vais me coucher avec, je me réveille avec, et je ne dors pas beaucoup", a commenté le président serbe Aleksandar Vucic. 

Son cabinet a répété jeudi son "énorme inquiétude pour l'avenir" de la minorité serbe et prévenu que la création d'une armée "empirera significativement la situation".

- Des bannières étoilées partout -

L'enjeu est autant politique que militaire. Selon les analystes au Kosovo, il faudra près d'une décennie pour que soit achevée la transformation en armée des KSF. 

Aujourd'hui forts de 2.500 membres, leurs effectifs doivent passer à 5.000, plus 3.000 réservistes, loin des quelque 30.000 soldats que compterait l'armée serbe selon les estimations.

Au Kosovo comme à Belgrade, l'option d'une escalade militaire n'est pas jugée crédible par les analystes, même si la Première ministre serbe Ana Brnabic a récemment assuré qu'elle était "sur la table". 

Sous couvert d'anonymat, une source diplomatique à l’Otan ne dissimule toutefois pas son inquiétude: si le souhait de se doter d'une armée est "légitime", cela devrait être fait "de façon progressive afin d’éviter l’escalade".

Tout en assurant que la Kfor continuerait d'assurer la sécurité du Kosovo, le secrétaire-général de l'Otan, Jens Stoltenberg a émis des réserves sur le calendrier de cette initiative qui pourrait avoir de "graves répercussions". 

Les responsables kosovars sont toutefois confortés par le soutien public de la Grande-Bretagne mais surtout des Etats-Unis, leur plus proche allié. 

La rue principale de Pristina, mais aussi de nombreux axes routiers, ont d'ailleurs été pavoisés de drapeaux américains, encore plus que de coutume. 

Jeudi, l'ambassadeur américain à Pristina Philip Kosnett a souhaité qu'après la création de l'armée les responsables de la région "concentrent leur énergie sur le dialogue" en vue de trouver un accord de normalisation des relations entre Belgrade et Pristina.

De son côté, le cabinet d'Aleksandar Vucic a dit son intention de consulter "les amis de la Serbie au Conseil de sécurité". 

AFP


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