Les élections au Liban renforcent le parti du Hezbollah

  08 Mai 2018    Lu: 2817
Les élections au Liban renforcent le parti du Hezbollah

Le parti du premier ministre Saad Hariri a lui perdu des sièges.

Le Premier ministre libanais Saad Hariri a annoncé lundi 7 mai que son mouvement avait perdu un tiers de ses sièges au sein du Parlement, au lendemain des premières législatives organisées dans le pays en près d'une décennie. Son grand rival, le mouvement du Hezbollah, en sort lui renforcé.

Le Courant du Futur disposera de 21 députés dans le nouvel hémicycle, a annoncé Saad Hariri lors d'une conférence de presse, contre 33 sièges dans le Parlement sortant (sur 128 au total). "Nous avions parié sur un meilleur résultat et un bloc plus large", a-t-il reconnu, justifiant ce recul en pointant notamment du doigt l'adoption d'une nouvelle loi électorale en 2017.

"Le problème de cette loi électorale, c'est que plein de gens ne l'ont pas comprise", a-t-il assuré, s'exprimant sur un ton décontracté, plaisantant avec les journalistes. Il a toutefois reconnu que certaines "performances n'étaient pas à la hauteur", sans expliciter. La nouvelle loi, qui introduit pour la première fois un mode de scrutin proportionnel, a laissé perplexes bien des électeurs, parfois obligés de choisir parmi des listes électorales alliant leurs candidats favoris à des partis qu'ils ne soutiennent pas.

"La reconduction de M. Hariri au poste de chef de gouvernement n'est toutefois pas menacée", a affirmé à l'AFP le politologue Karim el-Mufti. Le revers du camp Hariri intervient six mois après le feuilleton de sa démission surprise depuis Ryad, qui avait suscité une vaste mobilisation populaire et diplomatique.

Le Hezbollah en position de force, grâce à l'absence de coalition adverse

Le partage du pouvoir au Liban entre les différentes communautés religieuses empêche la suprématie d'un seul parti ou d'une communauté au sein de l'hémicycle.

Mais le grand rival de Saad Hariri, le mouvement chiite Hezbollah, un des principaux alliés de l'Iran au Moyen-Orient, semble en passe de confirmer son emprise sur la scène politique libanaise. Les premières tendances laissent penser que le Hezbollah devrait, avec ses alliés, pouvoir forger plus facilement une majorité en sa faveur, sur des questions clés telles que celle des armes, qu'il n'a jamais déposées après la guerre civile de 1975 à 1990.

Dans un contexte de fortes tensions régionales autour du rôle de l'Iran, principal parrain du mouvement chiite, "le Hezbollah est bien parti pour avoir une grande influence dans le processus décisionnel" au Liban, a indiqué à l'AFP Karim el-Mufti.

"C'est une grande victoire morale et politique pour la Résistance", a salué de son côté Hassan Nasrallah, le chef de ce mouvement allié à l'Iran, lors d'un discours retransmis à la télévision. "Nous pouvons dire aujourd'hui (...) que l'objectif a été réalisé. La composition du nouveau Parlement représente une garantie et une grande force pour (...) la protection de cette équation en or: l'armée, le peuple, la Résistance", a-t-il poursuivi, sans toutefois dire combien son parti et ses alliés avaient remporté de sièges.

Les nouveaux contours du Parlement pourraient en parallèle laisser le parti chrétien du président Michel Aoun jouer le rôle d'arbitre auquel il prétend, avec environ 28 sièges, selon les dernières estimations non officielles. "Le plus grand acteur sera le groupe du président Aoun, qui évoluera parmi les blocs non alignés, et le Hezbollah bénéficiera de ce fait de l'absence d'une large coalition" face à lui, a expliqué le politologue Imad Salamey.

Créé au début des années 1980 dans la foulée de la Révolution islamique iranienne pour lutter contre Israël, le Hezbollah combat actuellement en Syrie aux côtés du régime de Bachar al-Assad. Il est considéré comme une organisation "terroriste" par les Etats-Unis, et cinq de ses membres ont été accusés dans l'assassinat en 2005 de Rafic Hariri.

Les législatives de dimanche ont toutefois été marquées par un faible taux de participation de 49,2%, dans un pays où la corruption et le népotisme imputés à la classe politique font régner un certain désenchantement au sein de la population.


Tags: Liban   Hezbollah  


Fil d'info